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commission que par des rames de papier timbré. Vous diriez à ce M. Chopin que le sérénissime prince de Guise se moque de moi, chétif citoyen ; qu’il fait bombance à Arcueil, et laisse mourir de faim ses créanciers ; vous lui feriez un beau discours sur la révérence qu’on doit aux rentes viagères. Il est vrai que le roi a réduit les nôtres à la moitié, mais le prince de Guise n’est pas si modéré : il me retranche tout à fait les miennes. Je trouve ce procédé-là pire que les barricades de Guise le Balafré. Je souhaiterais que ce M. Chopin eût quelques rentes viagères, il verrait ce que c’est que de n’avoir point de quoi vivre de son vivant, et de laisser à ses hoirs trois ou quatre années à percevoir.

Je sais bien qu’il ne serait pas mal que je fusse à Paris ; mais je crois mes affaires mieux entre vos mains qu’entre les miennes.

Notre terre du Faou est un terrible embarras. Il s’agit de quatre mille livres de rente. Seriez-vous fâché de passer chez le notaire Lechanteur, rue Saint-Antoine, près de la Bastille ? C’est un bon homme, vrai et franc. Il vous dirait si M. de Richelieu a d’autres biens libres. C’est l’ancien notaire de la maison. Vous enverrez d’ailleurs à M. de Surville la lettre pour ses étrennes. Elle peut servir et ne peut nuire : donc il faut l’envoyer.

Adieu, mon cher abbé ; nous boirons à votre santé en mangeant le pâté.


980. — À M. THIERIOT.
Cirey, le 10 décembre.

Je me venge de vos critiques sur notre ami M. de La Bruère. Vous me donnez le fouet, et je le lui rends. Il est vrai que j’y vais plus doucement que vous ; mais c’est que je suis du métier, et je ne sais que douter quand vous savez affirmer. Je suis peut-être aussi exact que vous, mais je ne suis pas si sévère. Voici donc, mon cher ami, son opéra[1], que je lui renvoie avec mes apostilles et une petite lettre, le tout adressé à Père Mersenne.

Je me rends sur quelques-unes de vos censures. L’Épître sur l’Homme[2] est toute changée ; enfin je corrige tout avec soin. L’objet de ces six Discours en vers est peut-être plus grand que celui des satires et des épîtres de Boileau. Je suis bien loin de croire les personnes qui prétendent que mes vers sont d’un ton supérieur au sien. Je me contenterai d’aller immédiatement

  1. Celui de Dardanus, joué en 1739.
  2. Le sixième Discours.