Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome36.djvu/309

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Voudriez-vous qu’à la fin du troisième acte le fond du théâtre représentât les Pyrénées ? L’Amour leur ordonnerait de disparaître, afin de ne faire qu’un peuple de la France et de l’Espagne, et on verrait à leur place une salle de bal où le duc de Foix danserait avec sa dame, etc. Je chercherai tant qu’à la fin j’approcherai de vos idées. Encouragez-moi, je vous supplie ; soyez sûr que tous les divertissements seront faits avant le mois de juillet ; qu’il ne faudra pas un mois à Rameau ; que je travaillerai la pièce avec tout le soin possible, et que je n’aurai rien fait en ma vie avec plus d’application ; mais, encore une fois, ne me jugez point sur cette misérable esquisse ; et, s’il y a quelques scènes qui vous plaisent, croyez que tout sera travaillé dans ce goût ; soyez sûr enfin que vous serez servi à point nommé, et que tout sera prêt pour votre retour.

Mme du Châtelet regrette toujours la Petite Fête des bergers, et

Du sort de Polémon l’intéressante histoire[1].

Mais il me semble que cette nouvelle façon serait plus susceptible de spectacle. Je vous demande toujours la permission d’envoyer à Rameau les autres divertissements. Je vous supplie de dicter vos ordres en prenant votre thé, si vous prenez du thé devant Menin ou dans Menin. Tâchez d’aller à Bruxelles, car on nous y dénie justice[2]. Mme du Châtelet vous aime véritablement ; je vous le dis c’est une très-bonne femme. Adieu, monseigneur, mon cher protecteur ; adieu.


1662. — À M. THIERIOT.
À Cirey, le 11 juin.

Souvenez-vous que j’avais dit à celui qui vous fait tant attendre :

Titus perdit un jour, et vous n’en perdrez pas[3].

Je n’ai point dit vous n’en perdez pas, puisque voilà neuf années[4] perdues jusqu’à présent pour vous. Cependant je ne puis

  1. Il ne reste aucune trace de la Petite Fête des bergers.
  2. Il s’agit du procès entre les maisons du Châtelet et de Honsbrouck, qui durait depuis soixante ans, pour lequel, depuis 1739, Voltaire et Mme du Châtelet firent plusieurs voyages à Bruxelles, et qui finit enfin par s’accommoder.
  3. Derniers vers de l’Épître au roi de Prusse sur son avènement à la couronne (1740). Voyez tome X.
  4. Lisez sept. Thieriot, à la recommandation de Voltaire, ne devint l’agent lit-