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Dieu. Je me suis rencontré avec vous dans ma réponse, car je lui dis que je n’ai jamais cru si fermement à son infaillibilité.

Je resterai ici jusqu’à ce que j’aie recueilli toutes mes anecdotes sur les campagnes du roi, et que j’aie dépouillé les fatras des bureaux. J’y travaille, comme j’ai toujours travaillé, avec passion ; je ne m’en porte pas mieux. Je vous apporterai ce que j’aurai ébauché. M. et Mme d’Argental seront toujours les juges de mes pensées et les maîtres de mon cœur.

Bonsoir, couple adorable ; je vous donne ma bénédiction, je vous remets les peines du purgatoire, je vous accorde des indulgences. C’est ainsi que doit parler votre saint serviteur, en vous envoyant la lettre du pape ; mais, charmantes créatures, il serait plus doux de vivre avec vous que d’avoir la colique en ce monde, et d’être sauvé dans l’autre. Hélas ! je ne vis point ; je souffre toujours et je ne vous vois pas assez. Quel état pour moi, qui vous aime tous deux comme les saints (au nombre desquels j’ai l’honneur d’être) aiment leur Dieu créateur !


1766. — À M. DE CIDEVILLE.
Le 6 octobre.

Lorsque tu fais un si riche tableau
Du fier vainqueur de l’Issus et d’Arbelles,
Tu veux encor que je sois un Apelles !
Il fallait donc me prêter ton pinceau.

Ô loisir qui me manquez, quand pourrai-je, entre vos bras, répondre tranquillement, et à mon aise, aux bontés de mon cher Cideville ! Ô santé, quand écarterez-vous mes tourments, pour me laisser tout entier à lui !

Je suis accablé de mes maux d’entrailles, et il faut pourtant préparer des fêtes et écrire les campagnes du roi. Allons, courage ; soutenez-moi, mon cher ami. Vous m’avez déjà encouragé dans le Poëme de Fontenoy ; continuez.

Je vous fais part ici d’une petite lettre du saint-père, avec laquelle je vous donne ma bénédiction ; mais j’aimerais mieux faire pour votre académie[1] une inscription qui pût lui plaire, et n’être

  1. L’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Rouen, fondée en 1744, principalement par les soins de Cideville, qui, à la première séance, et la même année, lut un Discours sur l’établissement de cette société. On chercherait vainement le nom de Voltaire sur la liste des membres de l’Académie de Rouen. Cela doit paraître d’autant plus singulier que l’auteur de la Henriade, ami intime de Cideville et de plusieurs autres académiciens normands, fut membre de la plupart des sociétés littéraires et savantes de l’Europe. (Cl.)