Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome40.djvu/457

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dies que nous allons jouer, avoir une correspondance suivie avec ma cousine Vadé, avec M. de Kouranskoy, cousin germain de M. Alethof, avec le frère de la Doctrine chrétienne, auteur de la Vanité. Cependant M. de Courteilles, qui s’en va aux eaux de Vichy, me laisse en proie aux publicains maudits dans l’Écriture ; et, quoiqu’il soit démontré que je ne suis point seigneur de la Perrière, on veut me faire payer les dettes du roi ; Lefranc de Pompignan ne me traiterait pas plus rudement. M. le duc de Richelieu s’enfuit à Bordeaux sans me faire réponse, et sans m’envoyer un passe-port que je lui ai demandé pour un pauvre diable de Gascon hérétique ; et voilà mon hérétique sur le point d’être ruiné. Malgré tout cela, mon divin ange, voici encore quelques corrections nécessaires que le traducteur de M. Hume vous envoie. Maître Aliboron, dit Fréron, est un ignorant bien impudent de dire que le poëte-prêtre Hume n’est pas frère de Hume l’athée ; il ne sait pas que Hume le prêtre a dédié une de ses pièces à son frère.

J’avais tant crié après le Mémoire du sieur Lefranc de Pompignan qu’on m’en a envoyé trois par la dernière poste. Heureusement le frère de la Doctrine chrétienne, et M. de Kouranskoy, cousin germain de M. Alethof, en avaient chacun un.

Mon divin ange, je ne peux regarder Médime d’un mois. Il ne faut pas se morfondre et s’appesantir sur son ouvrage ; cela glace l’imagination.

À la façon dont vous parlez, on dirait que Mme de Robecq est morte[1] ; j’en suis fâché ; la mort d’une belle femme est toujours un grand mal. Est-il vrai que Mme du Deffant prend parti contre la philosophie, et qu’elle m’abandonne indignement ? Comment suis-je auprès de M. le duc de Choiseul ? a-t-il fait voir à Mme de Pompadour l’élucubration de M. de Kouranskoy ?

Je vous conjure de vous servir de toute votre éloquence pour lui dire que, s’il arrive malheur à Luc, il n’en résultera pas malheur à la France ; que le Brandebourg restera toujours un électorat ; qu’il est bon qu’il n’y ait pas d’électeur assez puissant pour se passer de la protection du roi ; que tous les princes de l’empire auront toujours recours à cette protection contra l’aquila grifagna[2].

  1. La princesse de Robecq était morte depuis deux jours quand Voltaire écrivait ; voyez tome XXXIX, page 245.
  2. C’est Louis Alamanni qui, dans un dialogue allégorique entre le coq et l’aigle, a dit :
    ..........aquila grifagna
    Che per più divorar duo becchi porta.