Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome40.djvu/474

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

affirme que la république a toujours eu omnimode juridiction sur la Perrière, laquelle omnimode juridiction elle a cédée au roi en 1749, par le traité fait entre cette république romaine et le roi de la Gaule Transalpine.


C’était un beau sujet de guerre
Ou’un logis où lui-même il n’entrait qu’en rampant.


Voilà une belle ambition d’être seigneur du trou de Jeannot Lapin ! À l’égard des six cents livres pour le procès de Panchaud, ce procès ne devait pas coûter six écus, et cet abus est un de ceux qui me font préférer les Délices au pays de Gex.

Cette affaire me conduit tout naturellement à celle du petit bois de Tournay, que Girod nomme forêt, comme les Bohèmes appelaient la maison de Ragotin château ; vous pouvez être sûr, monsieur, que les ingénieurs du roi qui ont arpenté la France par ordre du roi, et qui n’ont point payé au cabaret par ordre du roi, n’ont jamais trouvé d’autres dimensions à votre immense forêt que celle de quarante-trois arpents et demi[1].

De ces quarante-trois arpents et demi, vous en avez vendu la moitié en divers temps pour en avoir de l’argent comptant. Chouet, plus ivrogne que moi, et non moins imbécile, qui vous avait donné trois mille livres d’une terre qui n’en vaut pas deux mille, qui s’est ruiné à ce marché de fou, et qui va mourir insolvable ; Chouet, qui s’était fait votre fermier pour faire enrager son père le syndic ; Chouet a ravagé le reste de votre forêt Hercinie, a laissé dépérir les prés et les vignes : j’ai tout raccommodé, parce que j’aime l’ordre ; j’ai planté des arbres dans votre forêt ; j’ai fait porter de la terre neuve et meuble dans le champ maudit, auprès de la forêt, et j’ai rendu fertile une pièce de terre qui n’avait pas produit un grain d’orge depuis le déluge. Vous ne m’en savez nul gré, je le sais bien, et je m’y suis très-bien attendu ; j’ai fait le bien pour l’amour du bien même, et le ciel m’en récompensera ; je vivrai longtemps, parce que j’aime la justice. Les fermiers généraux ne l’aiment point, aussi sont-ils maudits dans saint Matthieu et dans le factum de Ramponeau.

Lefranc de Pompignan, natif de Montauban, est plus maudit encore pour avoir été orgueilleux.

  1. Ce grief reviendra souvent dans la suite de cette correspondance. On voudra bien noter que Voltaire n’articule nullement ici, comme il le fera plus tard, que le président lui eut garanti une contenance plus forte. (Note du premier éditeur.)