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CORRESPONDANCE




4282. — À MADAME LA COMTESSE D’ARGENTAL.
1er octobre.

Charmante madame Scaliger, la lettre, le savant commentaire du 24, redoublent ma vénération. M.  le duc de Villars s’habille pour jouer, à huis clos, Gengiskan[1] ; la Denis se requinque ; deux grands acteurs, par parenthèse. On rajuste mon bonnet, et je saisis ce temps pour vous remercier, pour vous dire la centième partie de ce que je voudrais vous dire. Je suis devenu un peu sourd, mais ce n’est pas à vos remarques, ce n’est pas à vos bontés[2].

Voilà à peu près tous les ordres de ma souveraine exécutés en courant. Toutes les judicieuses critiques scaligériennes ont trouvé un V. docile, un V. reconnaissant, un V. prompt à se corriger, et quelquefois un V. opiniâtre, qui dispute comme un pédant, et qui encore vous supplie à genoux d’accepter ses changements, de faire ôter ce détestable


Car tu m’as déjà dit que cet audacieux[3] ;


et il vous conjure, plus que jamais, d’ajouter au pathétique du tableau de Clairon, au cinq, ce morceau plus pathétique encore :


… Arrétez… vous n’êtes point mon père, etc.


Il me semble que, grâce à vos bontés, tout est à présent assez arrondi, malgré la multitude de tant d’idées étrangères à Tancrède, qui me lutinent depuis un mois.

Mme  Denis partage toute ma reconnaissance. Divins anges, veillez sur moi ; je vous adore du culte de dulie et de latrie.

  1. On raconte qu’un jour, après avoir joue ce rôle, le duc de Villars demanda à Voltaire comment il l’avait rempli, et que l’auteur de l’Orphelin lui répondit : Monseigneur, vous l’avez joué comme un duc et pair. (Cl.)
  2. Il y avait ici des corrections pour Tancrède. (K.)
  3. Voyez tome XL, page 557.