Puisque M. de Fleury[2] veut garder l’incognito, je ne sais point qu’il doit venir, et je n’ai point l’honneur de lui écrire.
S’il ne se propose que d’aller à Genève pour un jour et demi, il logera au cabaret et sera fort mal. Il fera un voyage peu agréable. Il ne verra point les environs ; les portes se ferment à six heures.
Mais s’il veut faire une halte aux Délices le lundi 13, comme il se le propose, il fera un léger dîner avec sa compagnie ; après quoi nous aurons l’honneur de le mener à Tournay, où nous lui donnerons une pièce nouvelle ; de là nous le remènerons, lui et sa compagnie, souper aux Délices ; et après souper, nous le mènerons coucher à Ferney. Quoique le château ne soit ni meublé, ni fini, il y trouvera dans les attiques quatre lits de maître et des lits pour ses domestiques. De là il prendra son parti ou d’aller voir Genève, ou de dîner à Ferney, ou de dîner aux Délices.
Ayez la bonté, monsieur, de lui présenter cette requête ; il mettra bon au bas s’il veut nous favoriser. Nous sommes à ses ordres. Nous avons ici M. le duc de Villars et M. de Saint-Priest. Tout s’est arrangé fort bien. On pardonne à la petitesse de ma maison, au théâtre de Polichinelle, à la médiocre chère, et cette indulgence nous encourage.
Présentez, je vous prie, mes respects à monsieur l’intendant ; donnez-moi ses ordres précis, et comptez, monsieur, sur le dévouement entier de votre très-humble et obéissant serviteur.
Le baron germanique[3] qui se charge de rendre ce paquet à Votre Excellence est un heureux petit baron. Je connais des Français qui voudraient bien être à sa place, et faire leur cour à M. et à Mme de Chauvelin. Je n’ai point eu l’honneur de vous écrire pendant que vous bouleversiez nos limites, et que vous