Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/210

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meix à Mlle Clairon. Je ne crois pas qu’il faille la publier si tôt ; il faut attendre du moins que Clairon soit guérie, et Fréron châtié.

Ne mettrez-vous point Diderot dans l’Académie ? Personne ne respecte l’abbé Le Blanc[1] plus que moi ; mais je ne crois pas qu’avec tout son mérite il doive passer devant Diderot.

Un grand homme comme lui devrait au contraire employer son crédit pour procurer à M. Diderot cette faible consolation de toutes les injustices qu’il a essuyées. Nous remettons tout à votre prudence ; vous savez agir comme écrire.

Votre Chaumeix ne s’appelle-t-il pas Sinon dans son nom de baptême ? N’est-il pas détaché par quelque Ulysse, et Omer n’est-il pas dans le cheval ?

Il y a des gens assez malavisés pour dire que


Le petit singe à face de Thersite[2]


s’appelle un Omer dans le pays des singes : voyez la méchanceté ! Je pense que voici le temps de faire sentir aux pédants en rabat, en soutane, en perruque, en cornette, qu’on les brave autant qu’on les méprise.

Pour moi, qui n’ai que deux jours à vivre, je les mettrai à persécuter les persécuteurs ; mais surtout je les mettrai à vous aimer.


4457. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
9 février.

Voici la plus belle occasion, mon cher ange, d’exercer votre ministère céleste. Il s’agit du meilleur office que je puisse recevoir de vos bontés.

Je vous conjure, mon cher et respectable ami, d’employer tout votre crédit auprès de M. le duc de Choiseul, auprès de ses amis ; s’il le faut, auprès de sa maîtresse, etc., etc. Et pourquoi osé-je vous demander tant d’appui, tant de zèle, tant de vivacité, et surtout un prompt succès ? Pour le bien du service, mon cher ange ; pour battre le duc de Brunswick. M. Gallatin, officier aux gardes suisses, qui vous présentera ma très-humble requête, est de la plus ancienne famille de Genève ; ils se font tuer pour nous, de père en fils, depuis Henri IV. L’oncle de celui-ci a été

  1. Voyez tome XXIV, page 31.
  2. Voyez la lettre a d’Argental, du 30 janvier.