Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome41.djvu/458

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La seconde grâce que je vous demande est de vouloir bien mettre M. Watelet[1] dans la liste de nos académiciens qui encouragent les souscriptions pour Mlle Corneille. Non-seulement M. Watelet prend cinq exemplaires, mais il a la bonté de dessiner et de graver le frontispice ; il nous aide de ses talents et de son argent ; gardez donc que l’ami Thieriot ne l’oublie. Ces petits soins peuvent vous amuser dans votre heureux loisir. Je porte un fardeau immense, et j’en suis charmé. Aidez-moi, instruisez-moi, écrivez-moi.


4682. — À M. DUCLOS.
Ferney, 19 septembre.

Je vous demande en grâce, monsieur, de vouloir bien engager nos confrères à daigner lire les corrections, les explications, les nouveaux doutes que vous trouverez dans le Commentaire de Cinna. Vous vous intéressez à cet ouvrage : je sais combien il est important que je ne hasarde rien sans vos avis. M. le duc de Villars est chez moi. Je ne connais personne qui ait fait une étude plus réfléchie du théâtre que lui. Il sent, comme moi, combien ces remords sont peu naturels, et par conséquent peu touchants, après que Cinna s’est affermi dans son crime, et dans une fourberie aussi réfléchie que lâche, qui exclut tout remords. Il est persuadé, avec moi, que ces remords auraient produit un effet admirable, s’il les avait eus quand il doit les avoir, quand Auguste lui dit qu’il partagera l’empire avec lui, et qu’il lui donne Émilie. Ah ! si dans ce moment-là même Cinna avait paru troublé devant Auguste ; si Auguste ensuite, se souvenant de cet embarras, en eût tiré un des indices de la conspiration, que de beautés vraies, que de belles situations un sentiment si naturel eût fait naître !

Nous devons de l’encens à Corneille, et assurément je lui en donne ; mais nous devons au public des vérités et des instructions. Je vous demande en grâce de m’aider ; le fardeau est immense, je ne peux le porter sans secours. Je vous importune beaucoup ; je vous importunerai encore davantage. Je vous demande la plus grande patience et les plus grandes bontés. L’Europe attend cet ouvrage. On souscrit en Allemagne et en Angleterre ; l’impératrice de Russie pour deux cents exemplaires, comme le roi. Je vous conjure de me mettre en état de répondre à des empresse-

  1. Voyez tome VII, page 244.