Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome42.djvu/430

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gieux crédit ! Jouissons d’une réhabilitation prononcée par toute l’Europe !

Quand je pourrai sortir j’irai chez vous, et je vous prierai d’y faire trouver M. de Moultou et M. de Végobre.

Je compte toujours d’écrire à M. de Végobre quand je vous écris, car je ne vous sépare point.


5227. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
Aux Délices, 11 mars.

Pour peu que mes anges soient curieux, ils pourront se mettre au fait de mon aventure des trois brancards[1], car me voici avec trois Corneille. La véritable est Mme Dupuits, les deux autres sont les descendants en ligne directe de Pierre, et sa sœur, dont on me menace, est la troisième ; mais Pierre est beaucoup plus embarrassant que les trois autres. Il n’y a pas, révérence parler, le sens commun dans ses dix dernières pièces ; et, à la réserve de la conférence de Sertorius et de Pompée, et de la moitié d’une scène d’Othon, qui ne sont, après tout, que de la politique très-froide, tout le reste est fort au-dessous de Pradon et de Danchet.

L’embarras du commentateur est plus grand chez moi que celui du père de famille. Mme Dupuits m’amuse par sa gaieté et par sa naïveté ; mais son oncle Pierre est bien loin de m’amuser. M. Dupuits et elle présentent leurs très-humbles et très-tendres reconnaissances à leurs anges ; il y a beau temps qu’ils ont écrit au père. J’ai vraiment grand soin que mes deux marmots remplissent leurs devoirs. Savez-vous bien que je les fais aller à la messe tout comme s’ils y croyaient ?

Je ne sais si mes anges sont de la paroisse de Saint-Eustache ; je les crois de Saint-Roch[2], et cela est fort égal, car Roch n’a pas plus existé qu’Eustache ; mais je hais Eustache, où l’on ne voulut point enterrer Molière, qui valait mieux que lui. Mes anges connaîtront sans doute quelque marguillier d’honneur de ce Saint-Eustache, quelque honnête dame, amie du curé, et on obtiendra aisément de lui qu’il fasse examiner les registres de la paroisse. Voici un petit mémoire qui mettra au fait. N’avez-vous pas la plus grande envie du monde de savoir comment mon confrère Pierre, gentilhomme ordinaire de Louis XIV, et fils de Pierre mon maître, a eu un fils mort à l’hôpital ?

  1. Roman comique de Scarron, chapitre iii.
  2. D’Argental, demeurant rue de la Sourdière, était de la paroisse de Saint-Roch,