Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome43.djvu/307

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phes attaqués par ceux mêmes qui devraient l’être, par ceux qui pensent comme nous, et qui auraient combattu sous les mêmes étendards s’ils n’avaient pas été possédés du démon de l’envie et de celui de la satire. Par quelle fureur enragée, quand on veut être satirique, n’exerce-t-on pas ce talent contre les persécuteurs des gens de bien, contre les ennemis de la raison, contre les fanatiques ?

Dites-moi, je vous prie, si frère Platon est lié avec le secrétaire de notre Académie. Je crois que ce secrétaire ne sera jamais l’ennemi de la philosophie ; mais je ne crois pas qu’il veuille se compromettre pour elle. Nous avons des compagnons, mais nous n’avons point de guerriers.

Vous souvenez-vous du petit ouvrage attribué à Saint-Évremont[1] ? On le réimprime en Hollande, revu et corrigé, avec plusieurs autres pièces dans ce goût. On m’en a promis quelques exemplaires, que je ne manquerai pas de faire passer à mon cher frère.

Bonsoir ; je ferme ma lettre, et je vous jure que ce n’est pas pour être oisif. Écr. l’inf…


5739. — À M.  LE MARQUIS ALBERGATI CAPACELLI[2].
À Ferney, 10 auguste.

Croiriez-vous, monsieur, que j’ai eu toutes les peines du monde à trouver dans Paris un exemplaire du nouveau Corneille commentée ? Il n’y en a plus à Genève ; les libraires n’en avaient point assez imprimé. En un mot, vous en recevrez un de Paris. Mais il faut vous résoudre à ne l’avoir que dans deux mois. Vous savez que les voitures ne font pas une grande diligence.

Nous avons actuellement à Genève un Italien d’un grand mérite : c’est M. Tiepolo, ambassadeur de Venise à Paris et à Vienne. Il est très-malade entre les mains de Tronchin, et je suis assez malheureux pour ne pouvoir aller le voir, étant plus malade que lui à ma campagne.

On voulait, ces jours passés, me faire jouer un rôle de vieillard sur mon petit théâtre ; mais je me suis trouvé en effet si vieux et si faible que je n’ai pu même représenter un personnage qui m’est si naturel. C’est à vous, monsieur, à vous

  1. L’Analyse de la religion chrétienne.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.