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le secret, et n’en a parlé à personne qu’à Protagoras lui-même[1]. Le livre d’ailleurs ne peut faire qu’un très-grand effet, et l’auteur jouira de sa gloire sans rien risquer.

Continuez, mon cher et digne frère, à faire aimer la vérité : c’est à elle que je dois votre amitié ; elle m’en est plus chère, et je mourrai attaché à vous et à elle.


5971. — À M.  DE LA HARPE.
2 avril.

Je me doutais bien, monsieur, que les vers charmants sur les Calas étaient de vous[2], car de qui pourraient-ils être ? J’avais reçu tant de lettres au sujet de cette famille infortunée qu’après les avoir mises dans mon portefeuille j’y trouvai votre belle épître sans adresse, et écrite, à ce qu’il me parut, d’une autre main que la vôtre.

J’apprends aujourd’hui par M. le marquis de Ximenès que je vous ai très-bien deviné ; mais je ne sais pas si bien répondre. Mon état est très-languissant et très-triste, et j’ai encore le malheur d’être surchargé d’affaires ; je vous assure que mes sentiments pour vous n’en sont pas moins vifs. J’ai été charmé de la candeur et de la réserve avec lesquelles vous m’avez écrit sur la pièce nouvelle. Cela est digne de vos talents, et met vos ennemis dans leur tort, supposé que vous en ayez. Il n’appartient qu’aux excellents artistes comme vous d’approuver ce que leurs confrères ont de bon, et de garder le silence sur ce qu’ils ont de moins brillant et de moins heureux. Vous avez tous les jours de nouveaux droits à mon estime et à ma reconnaissance, et vous pouvez toujours me parler avec confiance, bien sûr d’une discrétion égale à rattachement que je vous ai voué.


5972. — À M.  DEBRUS[3].
2 avril.

M, Debrus est probablement informé que le 21 mars toutes les chambres du parlement de Toulouse s’assemblèrent, et qu’on

  1. D’Alembert ; il s’agit de son écrit Sur la Destruction des jésuites en France, par un auteur désintéressé.
  2. Voici le premier vers de cette pièce adressée À Voltaire, sur la réhabilitation des Calas :

    Tu n’as pas vainement défondu l’innocence.

  3. Cette pièce clot la série des lettres à Debrus ; elle a été lue à la Convention