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ANNÉE 1766.

Les protestants se plaignent beaucoup de notre ami M. de Beaumont[1], qui réclame en sa faveur les lois rigoureuses sur les protestants, contre lesquelles il semble s’être élevé dans l’affaire des Calas. J’aurais voulu qu’il eût insisté davantage sur la lésion dont il se plaint justement, et qu’il eût fait adroitement sentir combien il en coûtait à son cœur d’invoquer des lois si cruelles. J’ai peur que son factum pour lui-même ne nuise à son factum pour les Sirven, et ne refroidisse beaucoup ; mais enfin tout mon désir est qu’il réussisse dans les deux affaires auxquelles je prends un égal intérêt.

Je ne sais comment vous êtes avec Thieriot ; je ne sais où il demeure ; je crois qu’il passe sa vie, comme moi, à être malade et à faire des remèdes. Cela le rend un peu inégal dans les devoirs de l’amitié ; mais il faut user d’indulgence envers les faibles. Je vous prie de lui faire passer ce petit billet.

Vous aurez incessamment quelque chose ; mais vous savez combien il est dangereux d’envoyer par les postes étrangères des brochures de Hollande. Nous recevons des livres de France, mais nous n’en envoyons pas. Tous les paquets qui contiennent des imprimés étrangers sont saisis, et vous savez qu’on fait très-bien, attendu l’extrême impertinence des presses bataves.

J’ai chez moi M. de La Borde, qui met Pandore en musique ; je suis étonné de son talent. Nous nous attendions, Mme Denis et moi, à de la musique de cour[2], et nous avons trouvé des morceaux dignes de Rameau. Tout cela n’empêche pas que je n’aie Belleval et Broutel[3] extrêmement sur le cœur.

Consolons-nous, mon cher frère, dans l’amour de la raison et de la vertu ; comptez que l’une et l’autre font de grands progrès. Saluez, de ma part, nos frères Barnabé, Thaddée, et Timothée. Écr. l’inf…


6512. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
19 septembre.

Mes divins anges, je vous avouerai longtemps que j’ai été pénétré de l’aventure que vous savez. Le jugement flétrissant porté unanimement contre ce monstre de Broutel a été une goutte de

  1. Voyez les lettres 6503, 6526, 6529.
  2. J.-B. de La Borde était valet de chambre du roi.
  3. L’un dénonciateur, l’autre juge du chevalier de La Barre ; voyez tome XXV, la Relation, etc., et la lettre 6494.