Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome44.djvu/73

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délices de vos amis comme vous avez fait celles du public ; et, en vérité, le public ne vaut pas des amis.

Toute ma famille vous fait les compliments les plus tendres et les plus sincères. Ne m’oubliez pas, je vous en supplie, auprès de M. le comte de Valbelle ; il ne m’appartient pas d’envier sa place, mais j’envie celle de M. de Neledenski, puisqu’il vous accompagne.

Si vous êtes à Aix, voulez-vous bien me recommander aux bontés de M. le duc de Villars ? Je ne le fatigue point de mes inutiles lettres, mais je lui serai attaché toute ma vie.

Adieu, mademoiselle ; si j’avais de la santé, vous me trouveriez à Lyon sur votre passage.


6109. — À M.  LE MARÉCHAL DUC DE RICHELIEU.
À Genève, 16 septembre.

Vous vous êtes donc mis, monseigneur, à ressusciter les morts ? Vous avez déterré je ne sais quelle Adélaïde morte en sa naissance, et que j’avais empaillée pour la déguiser en Duc de Foix. Vous lui avez donné la plus belle vie du monde. Tronchin n’approche pas de vous, quelque grand médecin qu’il soit ; il ne peut me faire autant de bien que vous en faites à mes enfants. Je ne désespère pas, tandis que vous êtes en train, que vous ne ressuscitiez aussi la Femme qui a raison. On prétend qu’il y a quelques ordures, mais les dévotes ne les haïssent pas. Que sait-on même si un jour vous ne ferez pas jouer la Princesse de Navarre ? La musique, du moins, en est très-belle, et je suis sûr qu’elle ferait grand plaisir : cela vaudrait bien un opéra-comique.

Je ne sais si Mlle  Clairon rajuste sa santé dans le beau climat de Provence. Je crois que le public ferait en elle une perte irréparable. Vous aurez trouvé que j’ai poussé l’enthousiasme un peu loin dans certains petits versiculets[1] ; mais si vous aviez vu comme elle a joué Électre dans mon tripot, vous me pardonneriez.

Vous allez vous occuper de plaisirs à Fontainebleau ; ces plaisirs-là sont de ma compétence, mais il ne m’appartient pas de les goûter à votre cour. J’ai environ deux douzaines d’enfants qui se produisent quelquefois sous votre protection ; mais pour

  1. L’Épître à mademoiselle Clairon.