Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome45.djvu/573

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
563
ANNÉE 1767

par la tête… Ah ! ce serait une grande folie ! Ne la voyez jamais que par le télescope de votre imagination, faites-nous un beau roman de son histoire, rendez-la aussi intéressante que la Sémiramis de votre tragédie ; mais laissez toujours entre elle et vous la distance des lieux, à la place de celle du temps. Si vous avez à voyager, venez aux bords de la Seine ; venez dans ma cellule, ce me serait un grand plaisir de vous embrasser et de passer mes derniers jours avec vous.

7216. — À MADAME FAVART[1].
Ferney, 23 mars.

Vous ne sauriez croire, madame, combien je vous suis obligé : ce que vous avez bien voulu m’envoyer[2] est plein d’esprit et de grâces, et je crois toujours que le dernier ouvrage de M. Favart est le meilleur. Ma foi, il n’y a plus que l’opéra-comique qui soutienne la réputation de la France. J’en suis fâché pour la vieille Melpomène, mais la jeune Thalie de l’hôtel de Bourgogne[3] éclipse bien par ses agréments la vieille majesté de la reine du théâtre. Permettez-moi d’embrasser M. Favart.

J’ai l’honneur d’être, avec les sentiments que je dois à tous deux, etc.

7217. — À M. HENNIN.
Mercredi au soir.

Mille tendres remerciements à mon très-cher ministre. Je n’oublierai jamais ses bontés. J’ai peur que la fille au vilain ne soit déjà mariée, du moins je la crois fiancée. Si vous pouvez, monsieur, vous échapper un moment, et venir à Ferney, j’ai bien des choses à vous dire. Je ne vous dirai jamais combien je vous aime et révère.

7218. — À MADAME LA MARQUISE DU DEFFANT.
30 mars.

Quand j’ai un objet, madame, quand on me donne un thème, comme, par exemple, de savoir si l’âme des puces est immor-

  1. Marie-Justine-Benoite du Ronceray, épouse de Ch.-S. Favart, née à Avignon le 15 juin 1727, et morte le 20 avril 1772. Elle était actrice au théâtre des Italiens ou Opéra-Comique, et a coopéré à quelques pièces de théâtre. (B.)
  2. Les Moissonneurs, comédie de Favart, mêlée d’ariettes, jouée le 27 janvier 1768.
  3. Le théâtre des Italiens était alors rue Mauconseil, à l’hôtel de Bourgogne.