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ANNÉE 1768.

retenu, pendant près de deux mois, deux ballots du Siècle de Louis XIV, dans l’idée que l’éloge de ce siècle des grands talents était une satire maligne de celui-ci. J’espère que, malgré cette louable délicatesse, vous recevrez à la fin votre exemplaire.

Vous trouverez, à l’article du Quiétisme, combien on a profité de vos bontés.

Je vous supplie, monsieur, de vouloir bien présenter à M. le duc de Bouillon les assurances de mon respect et du vif intérêt que je prends à sa santé et à sa conservation.

Agréez mes remerciements et tous les sentiments avec lesquels, etc.

7415. — À MADAME LA MARQUISE DU DEFFANT.
12 décembre.

Madame, les imaginations ne dorment point ; et quand même elles prendraient, en se couchant, une dose des oraisons funèbres de Pévêque du Puy[1] et de l’évêque de Troyes[2], le diable les bercerait toujours. Quand la marâtre nature nous prive de la vue, elle peint les objets avec plus de force dans le cerveau ; c’est ce que la coquine me fait éprouver.

Je suis votre confrère des Quinze-Vingts dès que la neige est sur mon horizon de quatre-vingts lieues de tour ; le diable alors me berce beaucoup plus que dans les autres saisons. Je n’ai trouvé à cela d’autre exorcisme que celui de boire : je bois beaucoup, c’est-à-dire demi-setier à chaque repas, et je vous conseille d’en faire autant ; il faut que ce soit d’excellent vin ; personne, de mon temps, n’en avait de bon à Paris.

L’aventure du président Hénault est assurément bien singulière. On s’est moqué de moi avec des Belloste et des Belestat, grands noms que vous connaissez. Je ne veux ni rien croire, ni même chercher à croire.

L’abbé Boudot a eu la bonté de fureter dans la Bibliothèque du roi. Il en résulte qu’il est très-vrai qu’aux premiers états de Blois, dont vous ne vous souvenez guère, on donna trois fois aux parlements le titre d’états généraux au petit pied[3]. Je ne pense point du tout que les parlements représentent les états généraux, sur quelque pied que ce puisse être ; et quand même j’aurais

  1. J.-G. Lefranc de Pompignan ; voyez page 184.
  2. Poncet de la Rivière.
  3. Vovez une note de la lettre 7447.