Aller au contenu

Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome46.djvu/397

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
387
ANNÉE 1769.
7599. — À M. MARIN.
19 juillet.

Je n’avais point achevé, monsieur, la lecture de l’Histoire du Parlement, lorsque je vous mandais que cet ouvrage me paraissait très-superficiel, et d’ailleurs un plagiat presque continuel. Mais je vous avoue que les derniers chapitres m’ont paru aussi indécents que faux et mal écrits. Qu’est-ce qu’un supplice perpétré ? qu’est-ce qu’un départ pour son exil ? qu’est-ce qu’un procès à faire à Damiens[1] ? Je ne connais guère de plus mauvais style que celui de ces derniers chapitres : ils ne paraissent pas de la même main que les premiers ; et ils sont si mauvais en tout sens qu’ils ne méritent pas qu’on les réfute. Si on lisait avec quelque attention, si tous les lecteurs étaient aussi judicieux que vous, on ne m’imputerait pas de telles rapsodies ; mais j’ai toujours remarqué qu’on ne lisait point, qu’on parcourait avec négligence, et qu’on jugeait au hasard. Rien ne peut égaler l’indignation où je suis, ni ma sincère amitié pour vous.

7600. — À M. LE COMTE DE LA TOURAILLE[2].
19 juillet.

Vraiment, monsieur, je ne savais pas l’honneur que vous m’avez fait et l’obligation que je vous ai. Vous écrivez des lettres charmantes à des pédants, et après vous être fait tailler avec tant de courage, vous vous amusez à venger la pauvre innocence opprimée. Vous rendez justice à la mémoire de mon cher oncle, l’abbé Bazin. Je le verrai bientôt, et je lui dirai ce que vous avez daigné faire pour lui ; il y sera sensible. Vous savez que les morts sont bien moins ingrats que les vivants.

Je ne sais pourquoi on s’obstine parmi les vivants à m’attribuer l’Histoire du Parlement. Il est juste que je prenne la liberté de vous confier ce que je pense sur cet ouvrage, dont l’impression est, je vous assure, un grand mystère d’iniquité. Voici la copie de la lettre que j’ai écrite[3] à M. Marin, secrétaire de la librairie. Vous vous êtes fait mon chevalier : vous voilà engagé par vos

  1. Voltaire, qui relève ces phrases, n’a pas changé la seconde ; voyez tome XVI, page 96.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François.
  3. Le 5 juillet.