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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome46.djvu/538

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CORRESPONDANCE.

perdues, attendu que sa sœur ne veut rien avancer, et qu’on ne voit pas où l’on prendrait ces deux mille écus. Je ne crois pas qu’on les assigne pour le présent sur les postes. Vos commis de ce grand bureau des secrets de la nation se tuent comme Caton ; mais Caton ne volait pas des caisses comme eux.

Votre roi de Portugal[1] n’a point été assassiné : il a eu quelques coups de bâton d’un cocu qui n’entend pas raillerie, et qui l’a trouvé couché avec sa femme : cela s’est passé en douceur, et il n’en est déjà plus question.

Mille respects à madame votre femme : conservez toujours vos bontés pour l’homme du monde qui vous est le plus attaché, et qui sent tout le prix de votre mérite et de votre amitié.

7750. — À M. DUPONT.
À Ferney, 11 janvier

Tâchez, mon cher ami, de tuer quelque gros prélat dont le bénéfice soit à la nomination de M. le duc de Wurtemberg, car il m’a promis que la première place serait pour monsieur votre fils, et M. de Montmartin m’en a donné aussi sa parole. Mais sur quelle parole peut-on compter ? Je n’entends parler ni de M. Roset, ni de la subrogation sur la terre du baron banquier Dietrich, ni du remboursement di questo barone. On s’est moqué de moi dans cet arrangement ; mais, après tout, le sieur Roset s’est soumis à me payer quatorze mille francs tous les trois mois jusqu’à fin de compte ; et quand même il dirait : Le beau billet qu’a La Châtre[2] ! il faut qu’il me donne de l’argent.

Je vous prie de vouloir bien le faire souvenir très-sérieusement de ses engagements, et d’avoir la bonté de me dire en quels termes on est avec le baron. Je soupçonne qu’il n’a jamais été question de le rembourser ; il est assez vraisemblable que tout mon argent a été donné à M. le prince de Wurtemberg, qui est à Montbéliard avec quatre enfants. Il est juste qu’étant prince et père de famille il passe avant nous ; mais il est juste aussi que Roset me paye, car j’ai aussi une nombreuse famille à nourrir. Je vous demande en grâce de me recommander à ses bontés, afin que je ne sois pas forcé de demander la protection du conseil souverain d’Alsace auprès de lui.

  1. Joseph 1er ; voyez tome XV, page 173. L’événement est du 3 décembre 1769.
  2. Mot de Ninon de Lenclos.