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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome47.djvu/153

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tème n’aurait pas été adopté du temps de Louis XIV, et que Jean-Baptiste Colbert avait plus de bon sens que Jean Lass.

À l’égard de la Compagnie des Indes, je doute fort que ce commerce puisse jamais être florissant entre les mains des particuliers. J’ai bien peur qu’il n’essuie autant d’avanies que de pertes, et que la Compagnie anglaise ne regarde nos négociants comme de petits interlopes qui viennent se glisser entre ses jambes. Les vraies richesses sont chez nous, elles sont dans notre industrie ; je vois cela de mes yeux. Mon blé nourrit tous mes domestiques ; mon mauvais vin, qui n’est point malfaisant, les abreuve ; mes vers à soie me donnent des bas ; mes abeilles me fournissent d’excellent miel et de la cire ; mon chanvre et mon lin me fournissent du linge. On appelle cette vie patriarcale ; mais jamais patriarche n’a eu de grange telle que la mienne, et je doute que les poulets d’Abraham fussent meilleurs que les miens. Mon petit pays, que vous n’avez vu qu’un moment, est entièrement changé en très-peu de temps.

Vous avez bien raison, monsieur, la terre et le travail sont la source de tout, et il n’y a point de pays qu’on ne puisse bonifier. Continuez à inspirer le goût de la culture, et puisse le gouvernement seconder vos vues patriotiques !

Mettez-moi, je vous prie, aux pieds de M. le duc de Saint-Mégrin[1], qui m’a paru fait pour rendre un jour de véritables services à sa patrie, et dont j’ai conçu les plus grandes espérances.

J’ai l’honneur d’être, avec la plus haute estime et tous les autres sentiments que je vous dois, monsieur, votre, etc.

P. S. Voulez-vous bien, monsieur, faire mes tendres compliments à M. l’abbé Morellet, quand vous le verrez ?

7963. À CATHERINE II,
impératrice de russie.
À Ferney, 20 juillet.

Madame, votre lettre du 6 juin, que je soupçonne être du nouveau style, me fait voir que Votre Majesté impériale prend quelque pitié de ma passion pour elle. Vous me donnez des consolations, mais aussi vous me donnez quelques craintes, afin de tenir votre adorateur en haleine. Mes consolations sont vos

  1. À qui est adressée la lettre 7381.