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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome47.djvu/312

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CORRESPONDANCE.
8142. — À M. LE COMTE DE FOY.
À Ferney, 24 décembre.

Je réponds fort tard, monsieur, à la lettre dont vous m’avez honoré, du 1er décembre : je ne l’ai reçue que le 15. J’ai soixante-dix-sept ans ; je suis très-malade : ce sont là des raisons pour n’être pas fort exact.

D’ailleurs, madame votre femme ayant des lettres de M. François de Sales ferait peut-être des signes de croix en voyant une lettre de François de Voltaire. Cela pourrait mettre du trouble dans votre ménage, et j’en serais très-affligé.

Je vois avec douleur que toutes les personnes dont vous me parlez sont mortes ; car, sans compter Mme de Chantal et son saint[1], nous avons perdu Mme de Pompadour, Mme la duchesse de Gotha, et Mme de Buchwald[2].

Si M. de Pezay, qui répand tant de fleurs dans ses vers, veut une place à l’Académie, je lui offre la mienne, qui sera bientôt vacante, et qui ne vaut pas celle qu’il a dans l’état-major. Au reste, monsieur, je suis très-sensible à l’honneur que vous me faites ; mais ce sont des gouttes d’Angleterre que vous envoyez à un apoplectique. Jouissez gaiement de la vie ; c’est tout ce que vous peut dire un homme qui est près de la perdre, et qui ne la regrette pas beaucoup.

8143. — À M. DUCLOS.
À Ferney, 24 décembre.

Mon vertueux et illustre confrère, vous aimez la liberté : vous avez trois places à donner[3], et je vous en fournirai bientôt une quatrième. Je vous conjure de ne jamais laisser entrer un homme qui menace les gens de lettres d’être leur délateur. Les Gaillard, les Delille, les La Harpe, sont sur les rangs, et ils ont des droits véritables ; mais s’il est vrai qu’il y ait des difficultés pour l’un d’eux, je vous recommande très-instamment M. Marin, qui joint à ses talents le mérite de rendre continuellement service à tous les gens de lettres. Il vaut beaucoup mieux avoir dans notre Académie un ami qu’un président ou un évêque.

  1. François de Sales.
  2. À qui est adressée la lettre 2559, tome XXXVIII, page 27.
  3. Celles de Moncrif, du président Hénault et de l’abbé Alary.