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Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/354

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CORRESPONDANCE.

8808. — À M. DE LA HARPE.
10 avril.

Je viens de retrouver une lettre de Clément[1], qu’il est bon de faire connaître à mon cher successeur. Il n’y a pas six mois d’intervalle entre cette lettre tout à fait cordiale et les pouilles qu’il nous chante à tous deux. Cela prouve que les grands hommes changent d’opinion volontiers, et se rétractent comme saint Augustin.

Le Mercure me paraît le greffe où cette lettre doit être déposée, avec quelques petites réflexions de votre part sur les progrès que font en peu de temps les hommes de génie, et sur la rapidité avec laquelle ils passent du pour au contre.

Je ne sais quand vous recevrez les Lois de Minos. La contrebande devient difficile. La pièce est suivie de notes fort édifiantes, du Discours de l’avocat Belleguier, et de plusieurs pièces dans ce goût, qui ne passeront jamais à la douane de la pensée. V.

8809. — À M. MARIN[2].
À Ferney. 10 avril.

Il me paraît que le public des honnêtes gens revient beaucoup en faveur de M. de Morangiés. C’est une chose bien absurde que la rétractation d’un faux témoin ne soit pas admise en justice après le récolement. Je regarde le désaveu fait par cette malheureuse Hérissé Tempête, avant d’être fouettée et marquée, comme une espèce de testament de mort qui doit servir de matière à une nouvelle instruction, et qui prouve évidemment que M. de Morangiés est opprimé par la plus infâme canaille. La faveur donnée à un vérolé, et le décret de prise de corps contre un chirurgien honnête homme, marquent, ce me semble, la plus mauvaise volonté de la part du juge. Ce juge s’est fait un point d’honneur de protéger la populace contre la noblesse ; mais il ne fallait protéger que la vérité contre l’imposture. Le grand malheur est qu’on ne peut prouver cette imposture juridiquement, et que les billets de M. de Morangiés subsistent toujours.

  1. La lettre de Clément est imprimée dans le Mercure de mai 1773, page 149 ; elle est du 5 décembre 1768, et se trouve tome XLVI, page 181, de la présente édition.
  2. Éditeurs, de Cayrol et François. Ils ont à tort donné cette lettre comme adressée a M. Tabareau.