Aller au contenu

Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome48.djvu/534

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme il convient. J’ose espérer qu’on fera bientôt une nouvelle édition in-4o, avec des planches qui me paraissent absolument nécessaires pour l’instruction de tout le militaire.

9004. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
À Ferney, 18 décembre.

Je crois, mon cher ange, vous avoir dit dans ma dernière lettre combien j’étais touché de la mort de M. de Chauvelin. Voilà donc les trois Chauvelin anéantis. Celui-là était le plus aimable des trois, et le plus raisonnable. Tout ce que nous voyons périr fait faire des réflexions qui ne sont pas plaisantes. Je suis presque honteux de vivre, et je ne sais pas trop pourquoi j’aime encore la vie.

Je sens que je suis un mauvais père, et tout le contraire des bons vieillards. Je me détache de mes enfants à mesure que j’avance en age, et que mes souffrances augmentent.

Voici pourtant la manière dont je voudrais finir Sophonisbe, à laquelle vous daignez vous intéresser :


· · · · · Ils sont morts en Romains.
Grands dieux ! puisse-je un jour, ayant dompté Carthage,
Quitter Rome et la vie avec même courage[1] !


Il me semble qu’il serait trop sec de finir par ce petit mot : Ils sont morts en Romains. L’étriqué me déplaît autant que le trop d’ampleur. D’ailleurs c’est une espèce d’avant-goût de ce qui arriva depuis à ce Scipion l’Africain.

Je ne puis rien pour la scène du mariage, et la tête me fend.

Portez-vous bien, vous et Mme d’Argental. C’est à vous de vivre, car je vous crois heureux autant que faire se peut ; pour moi, il n’importe.

Respect et tendresse.

9005. — DU CARDINAL DE BERNIS.
À Rome, ce 19 décembre.

J’ai fait ce que j’ai pu, mon cher confrère, pour établir ici avec sûreté pour vos horlogers la branche de commerce que vous m’aviez proposée. Cela n’est pas possible. Vous sentez que je ne veux pas et que je ne dois

  1. C’est en effet ainsi que se termine la pièce ; voyez tome VII, page 88.