On pardonne aisément à ceux qui sont à craindre.
Repens-toi seulement, mais repens-toi sans feindre ;
Il n’est que ce parti quand on est découvert :
Il blesse ta fierté, mais tout autre te perd,
Et je te donne au moins, quoi qu’on puisse entreprendre,
Le temps de quitter Rome, ou d’oser t’y défendre.
Plus de reproche ici sur tes complots pervers ;
Coupable, je t’aimais ; malheureux, je te sers :
Je mourrai pour sauver et tes jours et la gloire.
Adieu : Catilina doit apprendre à me croire :
Je l’avais mérité.
Que faire, et quel danger ?
Ecoutez… le sort change, il me force à changer…
Je me rends…je vous cède… il faut vous satisfaire…
Mais…songez qu’un époux est pour vous plus qu’un père
Et que, dans le péril dont nous sommes pressés,
Si je prends un parti, c’est vous qui m’y forcez.
Je me charge de tout, fût-ce encor de ta haine.
Je te sers, c’est assez. Fille, épouse, et Romaine,
Voilà tous mes devoirs, je les suis ; et le tien
Est d’égaler un cœur aussi pur que le mien.
Scène 4
Est-ce Catilina que nous venons d’entendre ?
N’es-tu de Nonnius que le timide gendre ?
Esclave d’une femme, et d’un seul mot troublé,
Ce grand cœur s’est rendu sitôt qu’elle a parlé.
Non, tu ne peux changer ; ton génie invincible,
Animé par l’obstacle, en sera plus terrible.
Sans ressource à Préneste, accusés au sénat,
Nous pourrions être encor les maîtres de l’état ;
Nous le ferions trembler, même dans les supplices.
Nous avons trop d’amis, trop d’illustres complices,
Un parti trop puissant, pour ne pas éclater.