suis fait une loi (et ce doit être celle de tout bon chrétien) de donner toujours le dixième de ce que je gagne ; c’est une dette que ma fortune doit payer à l’état malheureux où vous êtes… oui, où vous êtes, et dont vous ne voulez pas convenir. Voilà ma dette de cinq cents guinées payée. Point de remerciement, point de reconnaissance ; gardez l’argent et le secret.
Ma foi, ceci est bien plus original encore.
Je n’ai jamais été si confondue. Hélas ! que tout ce qui m’arrive m’humilie ! quelle générosité ! mais quel outrage !
L’impertinent gazetier ! le plat animal ! peut-on dire de telles pauvretés avec un ton si emphatique ? Le roi est venu en haute personne. Eh, malotru ! qu’importe que sa personne soit haute ou petite ? Dis le fait tout rondement.
Monsieur…
Eh bien ?
Ce que vous faites pour moi me surprend plus encore que ce que vous dites ; mais je n’accepterai certainement point l’argent que vous m’offrez : il faut vous avouer que je ne me crois pas en état de vous le rendre.
Qui vous parle de le rendre ?
Je ressens jusqu’au fond du cœur toute la vertu de votre procédé, mais la mienne ne peut en profiter : recevez mon admiration ; c’est tout ce que je puis.
Vous êtes cent fois plus singulière que lui. Eh ! madame, dans l’état où vous êtes, abandonnée de tout le monde, avez-vous perdu l’esprit de refuser un secours que le ciel vous envoie par la main du plus bizarre et du plus galant homme du monde ?
Et que veux-tu dire, toi ? en quoi suis-je bizarre ?
Si vous ne prenez pas pour vous, madame, prenez pour moi ; je vous sers dans votre malheur, il faut que je profite au