Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome5.djvu/616

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DAVID.

Arrêtez donc, vous voulez rire ; il y aurait là de quoi nourrir six mois toute la cour du roi d’Assyrie, et toute celle du roi des Indes.

JOAB.

Rien n’est pourtant plus vrai ; car cela est écrit dans vos livres.

DAVID.

Quoi ! tandis que je n’ai pas de quoi payer mon boucher ?

JOAB.

C’est qu’on vole Votre Altesse royale, comme j’ai déjà eu l’honneur de vous le dire,

DAVID.

Combien crois-tu que je doive avoir d’argent comptant entre les mains de mon contrôleur général ?

JOAB.

Milord, vos livres font foi que vous avez cent huit[1] mille talents d’or, deux millions vingt-quatre mille talents d’argent, et dix mille drachmes d’or ; ce qui fait au juste, au plus bas prix du change, un milliard trois cent vingt millions cinquante mille livres sterling.

DAVID.

Tu es fou, je pense : toute la terre ne pourrait fournir le quart de ces richesses : comment veux-tu que j’aie amassé ce trésor dans un aussi petit pays qui n’a jamais fait le moindre commerce ?

JOAB.

Je n’en sais rien, je ne suis pas financier.

DAVID.

Vous ne me dites que des sottises tous tant que vous êtes : je saurai mon compte avant qu’il soit peu ; et vous, Yesès, a-t-on fait le dénombrement du peuple ?

YESÈS.

Oui, milord ; vous avez onze cent[2] mille hommes d’Israël, et quatre cent soixante-dix mille de Juda, d’enrôlés pour marcher contre vos ennemis.

DAVID.

Comment ! j’aurais quinze cent soixante-dix mille hommes sous les armes ? Cela est difficile dans un pays qui, jusqu’à pré-

  1. Paralipomènes, chap. xxix, versets 4 et 7.
  2. Paralipomènes, chap. xxi, verset 5.