sent, n'a pu nourrir trente mille âmes : à ce compte, en prenant un soldat par dix personnes, cela ferait quinze millions sept cent mille sujets dans mon empire : celui de Babylone n’en a pas tant.
C’est là le miracle.
Ah ! que de balivernes ! Je veux savoir absolument combien j’ai de sujets ; on ne m’en fera pas accroire ; je ne crois pas que nous soyons trente mille.
Voilà votre chapelain ordinaire, le révérend docteur Gag, qui vient de la part du Seigneur parler à Votre Altesse royale.
On ne peut pas prendre plus mal son temps ; mais qu’il entre.
Scène II.
Que voulez-vous, docteur Gag ?
Je viens vous dire que vous avez commis un grand péché.
Comment ? en quoi ? s’il vous plaît.
En faisant faire le dénombrement du peuple.
Que veux-tu donc dire, fou que tu es ? Y a-t-il une opération plus sage et plus utile que de savoir le nombre de ses sujets ? Un berger n’est-il pas obligé de savoir le compte de ses moutons ?
Tout cela est bel et bon ; mais Dieu vous donne à choisir de la famine[1], de la guerre, ou de la peste.
Prophète de malheur, je veux au moins que tu puisses être puni de ta belle mission : j’aurais beau faire choix de la famine,
- ↑ Rois, II, chap. iv.