Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome5.djvu/75

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LE COMTE

Vite un carrosse.

LA MARQUISE

Oui, madame, à l'instant :
Vous devriez être sa protectrice.
Quand on a fait une telle injustice,
Sachez de moi que l'on ne doit rougir
Que de ne pas assez se repentir.
Monsieur mon fils a souvent des lubies
Que l'on prendrait pour de franches folies :
Mais dans le fond c'est un coeur généreux ;
Il est né bon ; j'en fais ce que je veux.
Vous n'êtes pas, ma bru, si bienfaisante ;
Il s'en faut bien.

LA BARONNE

Que tout m'impatiente !
Qu'il a l'air sombre, embarrassé, rêveur !
Quel sentiment étrange est dans son coeur ?
Voyez, monsieur, ce que vous voulez faire.

LA MARQUISE

Oui, pour Nanine.

LA BARONNE

On peut la satisfaire
Par des présents.

LA MARQUISE

C'est le moindre devoir.

LA BARONNE

Mais moi, jamais je ne veux la revoir ;
Que du château jamais elle n'approche :
Entendez-vous ?

LE COMTE

J'entends.

LA MARQUISE

Quel coeur de roche !

LA BARONNE

De mes soupçons évitez les éclats :
Vous hésitez ?

LE COMTE

Après un silence,

Non, je n'hésite pas.

LA BARONNE

Je dois m'attendre à cette déférence ;
Vous la devez à tous les deux, je pense.