Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/108

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Mes jours seront plus purs, et mes sens moins troublés ;
Je respire.

Sostène.

Seigneur, près d’Éphèse assemblés,
Les guerriers qui servaient sous le roi votre père
Ont fait entre mes mains le serment ordinaire:
Déjà la Macédoine a reconnu vos lois;
De ses deux protecteurs Éphèse a fait le choix.
Cet honneur, qu’avec vous Antigone partage,
Est de vos grands destins un auguste présage:
Ce règne, qui commence à l’ombre des autels,
Sera béni des dieux, et chéri des mortels;
Ce nom d’initié, qu’on révère et qu’on aime,
Ajoute un nouveau lustre à la grandeur suprême.
Paraissez.


Cassandre.

Je ne puis:tes yeux seront témoins

    comme en Égypte, que l’âme, serait un jour rejointe à son propre corps ; en un mot, quelle que fut l’opinion dominante, celle des peines et des récompenses après la mort était uuiverselle chez toutes les nations policées. Il est vrai que les Juifs ne connurent point ces mystères, quoiqu’ils eussent pris beaucoup de cérémonies des Égyptiens. La raison en est que l’immortalité de l’àme était le fondement de la doctrine égyptienne, et n’était pas celui de la doctrine mosaïque. Le peuple grossier des Juifs, auquel Dieu daignait se proportionner, n’avait même aucun corps de doctrine ; il n’avait pas une seule formule de prière générale établie par ses lois. On ne trouve, ni dans le Deutéronome, ni dans le Lévitique, qui sont les seules lois des Juifs, ni prière, ni dogme, ni créance de l’immortalité de l’âme, ni peines, ni récompenses après la mort. C’est ce qui les distinguait des autres peuples; et c’est ce qui prouve la divinité de la mission de Moïse, selon le sentiment de M. Warburton, évêque de Worcester [de Glocester]. Ce prélat prétend que Dieu, daignant gouverner lui-nième le peuple juif, et le récompensant ou le punissant par des bénédictions ou des peines temporelles, ne devait pas lui proposer le dogme de l’immortalité de l’âme, dogme admis chez tous les voisins de ce peuple. Les Juifs furent donc presque les seuls dans l’antiquité chez qui les mystères furent inconnus. Zoroastre les avait apportés en Perse, Orphée en Thrace, Osiris en Égypte, Mines en Crête, Cyniras en Chypre, Érechthée dans Athènes. Tous différaient, mais tous étaient fondés sur la créance d’une vie à venir, et sur celle d’un seul Dieu. C’est surtout ce dogme de l’unité de l’Être suprême qui fit donner partout le nom de mystères à ces cérémonies sacrées. On laissait le peuple adorer des dieux secondaires, des petits dieux, comme les appelle Ovide, vulgus deorum [Vos quoque, plebs superum, Fauni. Satyrique. Laresque. Ovide, Ibis, 81.], c’est-à-dire les âmes des héros, que l’on croyait participantes de la Divinité, et des êtres mitoyens entre Dieu et nous. Dans toutes les célébrations des mystères en Grèce, soit à Éleusis, Soit à Thèhes, soit dans la Samothrace, ou dans les autres îles, on chantait l’hymne d’Orphée : « Marchez dans la voie de la justice, contemplez le seul maître du monde, le