Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/109

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De mes premiers devoirs, et de mes premiers soins.
Demeure en ces parvis… Nos augustes prêtresses
Présentent Olympie aux autels des déesses :
Elle expie en secret, remise entre leurs bras,
Mes malheureux forfaits, qu’elle ne connaît pas.
D’aujourd’hui je commence une nouvelle vie.
Puisses-tu pour jamais, chère et tendre Olympie,
Ignorer ce grand crime avec peine effacé,
Et quel sang t’a fait naître, et quel sang j’ai versé !

Sostène.

Quoi ! Seigneur, une enfant vers l’Euphrate enlevée,
Jadis par votre père à servir réservée,
Sur qui vous étendiez tant de soins généreux,
Pourrait jeter Cassandre en ces troubles affreux !


Cassandre.

Respecte cette esclave à qui tout doit hommage :
Du sort qui l’avilit je répare l’outrage.
Mon père eut ses raisons pour lui cacher le rang

    Démiourgos. Il est unique, il existe seul par lui-même, tous les autres êtres ne sont que par lui ; il les anime tous : il n’a jamais été vu par des yeux mortels, et il voit au fond de nos cœurs. » Dans presque toutes les célébrations de ces mystères, on représentait, sur une espèce de théâtre, une nuit à peine éclairée, et des hommes à moitié nus, errant dans ces ténèbres, poussant des gémissements et des plaintes, et levant les mains au ciel. Ensuite venait la lumière, et l’on voyait le Démiourgos, qui représentait le maître et le fabricateur du monde, consolant les mortels, et les exhortant à mener une vie pure. Ceux qui avaient commis de grands crimes les confessaient à l’hiérophante, et juraient devant Dieu de n’en plus commettre. On les appelait dans toutes les langues d’un nom qui répond à initiatus, initié, celui qui commence une nouvellevie, et qui entre en communication avec les dieux, c’est-à-dire avec les héros et les demi-dieux ; qui ont mérité par leurs exploits bienfaisants d’être admis après leur mort auprès de l’Être suprême. Ce sont là les particularités principales qu’on peut recueillir des anciens mystéres, dans Platon, dans Cicéron, dans Porphyre, Eusèbe, Strabon, et d’autres. Les parricides n’étaient point reçus à ces expiations ; le crime était trop énorme. Suétone [Neron, xxxiv.] rapporte que Néron, après avoir assassiné sa mère, ayant voyagé en Grèce, n’osa assister aux mystères d’Éleusine. Zosime [ Hist. II, 9.] prétend que Constantin, après avoir fait mourir sa femme, son fils, son beau-père, et son neveu, ne put jamais trouver d’hiérophante qui l’admît à la participation des mystères. On pourrait remarquer ici que Cassandre est précisément dans le cas ou il doit être admis au nombre des initiés. Il n’est point coupable de l’empoisonnement d’Alexandre ; il n’a répandu le sang de Statira que dans l’horreur tumultueuse d’un combat, et en défendant son père. Ses remords sont plutôt d’une âme sensible et née pour la vertu, que d’un criminel qui craint la vengeance céleste. (Note de Voltaire.)