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EPITRE DÉDICATOIRE

11 y avait autrefois on Perse un bon vieillard ^ qui cultivait son jardin ; car il font finir par là ; et ce jardin était accompagné de vignes et de champs, et paulum siliw svper hh erat’- ; et ce jardin n’était pas auprès de Persépolis, mais dans une vallée immense entourée des montagnes du Caucase, couvertes de neiges éternelles ; et ce vieillard n’écrivait ni sur la population ni sur l’agricnltin-e, comme on faisait par passe-temps à Babylone, ville qui tire son nom de Babil ; mais il avait défriché des terres incultes, et triplé le nombre des habitants autour de sa cabane.

Ce bonhomme vivait sous Artaxercès, plusieurs années après l’aventure d’Obéide et d’Indatire ; et il fit une tragédie en vers persans, qu’il fit représenter par sa famille et par quelques bergers du mont Caucase ; car il s’amusait à faire des vers persans assez passablement, ce qui lui avait attiré de violents ennemis dans Babylone, c’est-à-dire une demi-douzaine de gredins qui aboyaient sans cesse après lui, et qui lui imputaient les plus grandes platitudes, et les plus impertinents livres qui eussent jamais déshonoré la Perse ; et il les laissait aboyer, et griffonner, et calomnier ; et c’était pour être loin de cette racaille qu’il s’était retiré avec sa famille auprès du Caucase, où il cultivait son jardin.

Mais, comme dit le poète persan Horace, Principibiis placuissc riris, non vllima laus est^. Il y avait à la cour d’Artaxercès un principal satrape, et son nom était Élochivis*, comme qui dirait habile, généreux, et plein d’esprit, tant la langue persane a d’énergie. Non-seulement le grand satrape Élochivis versa sur le

1. Ce bon vieillard est Voltaire lui-même. (B.)

2. Horace, livre II, satire vi, vers 3.

3. Horace, livre I*"’", cpître xvii, vers 3o.

4. L’auteur désignait par cette anagramme M. le duc de Choiscul, et par Nalrisp, M. le duc de Prasliii. (K.)