Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/30

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D’un grand projet j’ai la cervelle pleine ;
Mais je ne sais comment m’y prendre, hélas !
Que devenir ?… Dis-moi, ne sais-tu pas
Si monseigneur doit venir dans ses terres ?

COLETTE.

Nous l’attendons,

ACANTHE.

Nous l’attendons, Bientôt ?

COLETTE.

Nous l’attendons, Bientôt ?Je ne sais guères
Dans mon taudis les nouvelles de cour :
Mais s’il revient, ce doit être un grand jour.
Il met, dit-on, la paix dans les familles,
Il rend justice, il a grand soin des filles.

ACANTHE.

Ah ! s’il pouvait me protéger ici !

COLETTE.

Je prétends bien qu’il me protège aussi.

ACANTHE.

On dit qu’à Metz il a fait des merveilles,
Qui dans l’armée ont très-peu de pareilles ;
Que Charles-Quint a loué sa valeur.

COLETTE.

Qu’est-ce que Charles-Quint ?

ACANTHE.

Qu’est-ce que Charles-Quint ?Un empereur
Qui nous a fait bien du mal.

COLETTE.

Qui nous a fait bien du mal.Et qu’importe ?
Ne m’en faites pas, vous, et que je sorte
À mon honneur du cas triste où je suis.

ACANTHE.

Comme le tien, mon cœur est plein d’ennuis.
Non loin d’ici quelquefois on me mène
Dans un château de la jeune Dormène…

COLETTE.

Près de nos bois ?… ah ! le plaisant château !
De Mathurin le logis est plus beau ;
Et Mathurin est bien plus riche qu’elle.

ACANTHE.

Oui, je le sais ; mais cette demoiselle
Est autre chose ; elle est de qualité ;