Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/42

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Aux malheureux ; cette dame est si bonne !
Laure, surtout, cette vieille personne,
Qui m’a toujours montré tant d’amitié,
De moi sans doute aura quelque pitié :
Car sais-tu bien que cette dame Laure
Très-tendrement de ses bontés m’honore ?
Entre ses bras elle me tient souvent,
Elle m’instruit, et pleure en m’instruisant.

COLETTE.

Pourquoi pleurer ?

ACANTHE.

Pourquoi pleurer ? Mais de ma destinée :
Elle voit bien que je ne suis pas née
Pour Mathurin… Crois-moi, Colette, allons
Lui demander des conseils, des leçons…
Veux-tu me suivre ?

COLETTE.

Veux-tu me suivre ? Ah ! oui, ma chère Acanthe,
Enfuyons-nous ; la chose est très-prudente.
Viens ; je connais des chemins détournés
Tout près d’ici.


Scène IV.



ACANTHE, COLETTE, BERTHE, DIGNANT, MATHURIN.


BERTHE, arrêtant Acanthe.

Tout près d’ici. Quel chemin vous prenez !
Êtes-vous folle ? et quand on doit se rendre
À son devoir, faut-il se faire attendre ?
Quelle indolence ! et quel air de froideur !
Vous me glacez : votre mauvaise humeur
Jusqu’à la fin vous sera reprochée.
On vous marie, et vous êtes fâchée.
Hom, l’idiote ! Allons, çà, Mathurin,
Soyez le maître, et donnez-lui la main.

MATHURIN, approche sa main, et veut l’embrasser.

Ah ! palsandié…

BERTHE.

Ah ! palsandié… Voyez la malhonnête !
Elle rechigne, et détourne la tête !