Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome6.djvu/467

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MONSIEUR GARANT.

Qui parle ici de votre fille ?

MADAME AGNANT.

De qui donc parlez-vous ?

MONSIEUR GARANT.

De la belle Ninon,
Que j’épouse ce soir, ici, dans sa maison ;
Je vous prie à la noce, et vous devez en être.

MADAME AGNANT.

Comment ! vous épousez notre Ninon ?

MONSIEUR AGNANT.

Mon maître,
Est-il bien vrai ?

MONSIEUR GARANT.

Très vrai.

MONSIEUR AGNANT.

J’en suis, parbleu, touché.
Vous ne pourriez jamais faire un meilleur marché.

MADAME AGNANT.

Et moi je vous disais que je donne Sophie
À mon petit Gourville, et qu’elle s’est blottie
Chez vous, en votre absence, et qu’elle en va sortir
Pour serrer ces doux nœuds que je viens d’assortir,
Et qu’il nous faut donner, pour aider leur tendresse,
Cent mille francs comptant que vous avez en caisse.

MONSIEUR AGNANT.

Oui, tant qu’il vous plaira, mariez-vous ici ;
Mais, parbleu, permettez qu’on se marie aussi.

MONSIEUR GARANT.

Rêvez-vous, mes voisins ? Et ce petit délire
Vous prend-il quelquefois ? Qui diable a pu vous dire
Que Sophie est chez moi, que Gourville aujourd’hui
Aura cent mille francs qui sont tout prêts pour lui ?

MADAME AGNANT.

Je le tiens de sa bouche.

MONSIEUR AGNANT.

Il nous l’a dit lui-même.

MONSIEUR GARANT.

De ce jeune étourdi la folie est extrême ;
Il séduit tour à tour les filles du Marais ;
Il leur fait des serments d’épouser leurs attraits ;
Et pour les mieux tromper, il fait accroire aux mères