Mon père ! En frémissant je tombe à vos genoux.
Ne craignez rien, parlez à l’époux qui vous aime.
J’atteste ce soleil, image de Dieu même,
Que je voudrais pour vous répandre tout le sang
Dont ces prêtres de mort vont épuiser mon flanc.
Ah ! Que me dites-vous ? Et quelle défiance !
Tout le mien coulera plutôt qu’on vous offense ;
Ces tyrans confondus sauront nous respecter.
Juste Dieu ! Que mon cœur ne peut-il mériter
Une bonté si noble, une ardeur si touchante !
Je m’honore moi-même, et ma gloire est contente
Des honneurs qu’on doit rendre à ma digne moitié.
C’en est trop… bornez-vous, Seigneur, à la pitié ;
Mais daignez m’assurer qu’un secret qui vous touche
Ne sortira jamais de votre auguste bouche.
Je vous le jure.
Eh bien !…
Vous semblez hésiter,
Et vos regards sur moi tremblent de s’arrêter ;
Vous pleurez, et j’entends votre cœur qui soupire.
Écoutez, s’il se peut, ce que je dois vous dire :
Vous ne connaissez pas la loi que nous suivons ;
Elle peut être horrible aux autres nations ;
La créance, les mœurs, le devoir, tout diffère ;
Ce qu’ici l’on proscrit, ailleurs on le révère :
La nature a chez nous des droits purs et divins
Qui sont un sacrilège aux regards des Romains ;
Notre religion, à la vôtre contraire,
Ordonne que la sœur s’unisse avec le frère,
Et veut que ces liens, par un double retour,
Rejoignent parmi nous la nature à l’amour ;