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LE MARQUIS.

Par mon ordre ?

DIGNANT.

Par mon ordre ? Oui.

LE MARQUIS.

Par mon ordre ? Oui. Quelle injure nouvelle !
Tous ces gens-ci perdent-ils la cervelle ?
Allez-vous-en, laissez-moi, sortez tous.
Ah ! s’il se peut, modérons mon courroux…
Non, vous, restez.

MATHURIN.

Non, vous, restez. Qui ? moi ?

LE MARQUIS, à Dignant.

Non, vous, restez. Qui ? moi ?Non, vous, vous dis-je.


Scène X.



LE MARQUIS, sur le devant ; DIGNANT, au fond.


LE MARQUIS.

Je vois d’où part l’attentat qui m’afflige.
Le chevalier m’avait presque promis
De se porter à des coups si hardis.
Il croit au fond que cette gentillesse
Est pardonnable au feu de sa jeunesse :
Il ne sait pas combien j’en suis choqué.
À quel excès ce fou-là m’a manqué !
Jusqu’à quel point son procédé m’offense !
Il déshonore, il trahit l’innocence :
Voilà le prix de mon affection
Pour un parent indigne de mon nom !
Il est pétri des vices de son père ;
Il a ses traits, ses mœurs, son caractère ;
Il périra malheureux comme lui.
Je le renonce, et je veux qu’aujourd’hui
Il soit puni de tant d’extravagance.

DIGNANT.

Puis-je en tremblant prendre ici la licence
De vous parler ?

LE MARQUIS.

De vous parler ? Sans doute, tu le peux :