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ACTK I, SCtNE I. 264

Fuyait les factions de Tolède alarmée ;

Elle fuyait don Pèdre… 11 la fait enlever.

De mes biens, en tout temps, ardent à me priver,

Il la retient ici captive avec sa mère.

Voudrait-il seulement l’arracher à son frère ?

Croit-il, de tant d’objets trop heureux séducteur,

De ce cœur simple et vrai corrompre la candeur ?

Craindrait-il en secret les droits que Léonore

Au trône castillan peut conserver encore ?

Prétend-il l’épouser, ou d’un nouvel amour

Étaler le scandale à son indigne cour ?

Veut-il des La Cerda déshonorer la fille,

La traîner en triomphe après Laure et Padille,

Et, d’un peuple opprimé bravant les vains soupirs,

Insulter aux humains du sein de ses plaisirs ?

ALMÎiDE,

Les femmes, en tous lieux souveraines suprêmes.

Ont égaré des rois ; et les cours sont les mêmes.

Mais peut-être Guesclin dédaignera d’entrer

Dans ces petits débats qu’il semblait ignorer.

Son esprit mâle et ferme, et même un peu sauvage,

Des faiblesses d’amour entend peu le langage.

Honoré par son roi du nom d’ambassadeur.

Il soutiendra vos droits avant que sa valeur

Se serve ici pour vous, dignement occupée.

Des dernières raisons, les canons et l’épée.

Mais jusque-là don Pèdre est le maître en ces lieux.

ÏRANSÏAMARE.

Lui, le maître ! ah ! bientôt tu nous connaîtras mieux.

Il veut l’être en effet ; mais un pouvoir suprême

S’élève et s’affermit au-dessus du roi même.

Dans son propre palais les états convoqués

Se sont en ma faveur hautement expliqués ;

Le sénat castillan me promet son suffrage.

A don Pèdre égalé, je n’ai pas l’avantage

D’être né d’un hymen approuvé par la loi ;

Mais tu sais qu’en Europe on a vu plus d’un roi.

Par soi-même élevé, faire oublier l’injure

Qu’une loi trop injuste a faite à la nature.

Tout est au plus heureux, et c’est la loi du sort.

Un bâtard, échappé des pirates du Nord,

A soumis l’Angleterre ; et, malgré tous leurs crimes.