Contre votre tyran quand j'osais vous défendre,
À votre ingratitude aurais-je dû m'attendre ?
Je n'étais point ingrate : un jour vous apprendrez
Les malheureux combats de mes sens déchirés ;
Vous plaindrez une femme en qui, dès son enfance,
Son coeur et ses parents formèrent l'espérance
De couler de ses ans l'inaltérable cours
Sous les lois, sous les yeux du héros de nos jours ;
Vous saurez qu'il en coûte alors qu'on sacrifie
À des devoirs sacrés le bonheur de sa vie.
Quoi ! Vous pleurez, Irène ! Et vous m'abandonnez !
À nous fuir pour jamais nous sommes condamnés.
Eh ! Qui donc nous condamne ? Une loi fanatique !
Un respect insensé pour un usage antique,
Embrassé par un peuple amoureux des erreurs,
Méprisé des césars, et surtout des vainqueurs !
Nicéphore au tombeau me retient asservie,
Et sa mort nous sépare encore plus que sa vie.
Chère et fatale Irène, arbitre de mon sort,
Vous vengez Nicéphore et me donnez la mort.
Vivez, régnez sans moi, rendez heureux l'empire :
Le destin vous seconde ; il veut qu'une autre expire.
Et vous daignez parler avec tant de bonté !
Et vous vous obstinez à tant de cruauté !
Que m'offriraient de pis la haine et la colère ?
Serez-vous à vous-même à tout moment contraire ?
Un père, je le vois, vous contraint de me fuir :
À quel autre auriez-vous promis de vous trahir ?
À moi-même, alexis.
Non, je ne le puis croire,
Vous n'avez point cherché cette affreuse victoire ;
Vous ne renoncez point au sang dont vous sortez,