Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome7.djvu/417

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Tu n’en as que la fange où le ciel le fit naître.
Il a su la couvrir par les vertus d’un maître ;
Et tes égarements, qui l’ont trop démenti,
T’ont remis dans le rang dont il était sorti.

POLYCRATE.

Ils m’ont laissé ce bras pour punir un perfide.

ELPÉNOR, arrivant, à Polycrate.

Seigneur, le roi vous mande.

POLYCRATE.

Oui, j’obéis… Argide,
Voilà ton dernier trait ; mais tremble à mon retour.
(Il sort.)

ARGIDE.

Je t’attends : nous verrons avant la fin du jour
Si la férocité, la menace, et l’outrage,
Ou cachaient ta faiblesse, ou montraient ton courage.


Scène III.



ARGIDE, ELPÉNOR.


ELPÉNOR.

Qu’ai-je entendu, seigneur ? et quel ardent courroux
Arme à mes yeux surpris et votre frère et vous ?
Hélas ! je vous ai vus ennemis dès l’enfance ;
Mais ai-je dû m’attendre à tant de violence ?
Vous me faites frémir.

ARGIDE.

Vos conseils me sont chers ;
Mais j’appris de vous-même à braver les pervers :
Je l’appris encor plus dans Sparte et dans Athène.
Elpénor, condamnez ma franchise hautaine ;
Mon cœur, je l’avouerai, n’est pas fait pour la cour.

ELPÉNOR.

Il est libre, il est grand ; mais, seigneur, si l’amour,
Mêlant à vos vertus ses faiblesses cruelles,
Allume entre vous deux ces fatales querelles !
On le soupçonne au moins.

ARGIDE.

Ah ! ne redoutez rien ;
Je ne sais point former un indigne lien.