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TROISIÈME JOURNÉE. 515

de la haine, quand j’imagine qu’il est un tyran, et qu’il m’ôte l’empire qui était à moi ’.

HKllACLIUS.

Je vis abhorré de Pliocas. Je me vois dans le plus grand danger : mais, n’importe ; je triomphe d’avoir su quel noble sang échauffe mes veines, quoique à présent ce feu soit attiédi.

P n C A s, derrière eux.

Je ne peux rien avérer sur ce qu’ils disent : approchons-nous pour les écouter ; peut-être que du mensonge on passera k la vérité. Je me sens trop troublé par les inquiétudes de tout ce songe, dont la rêverie est un vrai délire.

LÉONIDE.

Je n’ai ni frein, ni raison, ni jugement ; je ne veux que régner, et je ferai tout pour y parvenir.

HÉRACLIUS.

Et moi, je n’ai d’autre ambition, d’autre désir, que d’être digne de ce que je suis. Laissons au ciel l’accomplissement de mes desseins ; il soutiendra ma cause.

Ici Hcraclius se retire un moment sans qu’on en sache la raison,

LÉONIDE.

Il est parti, et je reste seul. Non ; je ne suis pas seul : mes inquiétudes, mes peines, sont avec moi ; je suis si saisi d’horreur en voyant le traître qui m’empêche de ceindre mon front du laurier sacré des empereurs, que je ne sais comment je résiste aux emportements de ma colère,

HÉRACLIUS, revenant.

J’avais fui de ces lieux pour calmer mes inquiétudes ; mais, ayant trouvé du monde dans le chemin, je rentre ici pour ne parler à personne.

LÉONIDE.

Cependant si Libia m’a fait entendre, en m’en disant davantage, que quand Phocas sera mort il faudra bien que tout le monde prenne mon parti, je dois espérer-. Mais quoi ! je me suis senti

1. On sent combien ce discours est absurde : comment l’empire était-il à Léonide ? Parlerait-il autrement si on lui avait dit qu’il est le fils de Maurice ? Chacun d’eux croit-il que c’est à lui que Libia et Cintia ont parle ? Tout cela paraît d’une démence inconcevable. {Note de Voltaire.)

2. Libia ne lui a rien dit de cela ; c’est à Hcraclius qu’elle a tenu ce propos : apparemment qu’il y a dans cette scène un jeu de théâtre tel que chacun des deux princes puisse croire que Libia s’adresse à lui, l’appelle Héraclius, et déclare qu’il est fils de Maui’ice. (Note de Voltaire.)