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ACTE V, SCÈNE III. 87

MASSIMSSE.

Tiens, la voiU\, perfide! elle est devant tes yeux; La connais-tu?

SCII'ION.

Cruel !

SOPHONISBE, à Massinissc penché vers elle.

Viens, que ta main chérie Achève de m'ôter ce iardeau de la vie. Digne époux, je meurs libre, et je meurs dans tes bras,

MASSINISSE.

Je vous la rends, Romains, elle est à vous».

SCIPION.

Hélas ! Malheureux! qu as-tu fait?

MASSINISSE.

Ses volontés, les miennes. Sur ses bras tout sanglants viens essayer tes chaînes : Approche : où sont tes fers?

LÉLIE.

spectacle d'horreur!

MASSINISSE, à Scipion.

Tu recules d'effroi! Que devient ton grand cœur?

(Il se mot entre Sophonisbe et les Romains.)

Monstres, qui par mes mains avez commis mon crime.

Allez au Capitole offrir votre victime:

Montrez à votre peuple, autour d'elle empressé,

Ce cœur, ce noble cœur que vous avez percé.

Détestables Romains, si les dieux qui m'entendent

Accordent les faveurs que les mourants demandent ;

Si, devançant le temps, le grand voile du sort-

Se lève à nos regards au moment de la mort,

Je vois dans l'avenir Sophonisbe vengée,

Et Rome qu'on immole à la terre outragée ;

Je vois dans votre sang vos temples renversés,

Ces temples qu'Vnnibal a du moins menacés;

Tous ces fiers descendants des Nérons, des Camilles,

Vux fers des étrangers tendant des bras servîtes ;

Ton Capitole en cendre, et tes dieux pleins d'effroi

��1. Le public ne comprit pas d'abord ce coup de théâtre. Il lui fallut l'aveu mâme de Massinisse. (G. A.)

2. C'était une opinion reçue. (/Voie de Voltaire.)

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