Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome9.djvu/101

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Dont Dieu punit le cœur dur et superbe,
Devenu bœuf, et sept ans nourri d’herbe,
Redevint homme, et n’en fut pas meilleur.



Du cintre bleu de la céleste sphère,
Denys voyait avec des yeux de père
De Jeanne d’Arc le déplorable cas ;
Il eût voulu s’élancer ici-bas,
Mais il était lui-même en embarras.
Denys s’était attiré sur les bras
Par son voyage une fâcheuse affaire.
Saint George était le patron d’Angleterre[1] ;
Il se plaignit que monsieur saint Denys,
Sans aucun ordre et sans aucun avis,
A ses Bretons eût fait ainsi la guerre.

    assiégea Jérusalem, la prit, et lit charger de fers Joachim, roi de Juda, qu’il envoya prisonnier à Babylone, l’an du monde 3429. Nébucadnetzar f‍it un songe, et l'oublia; les magiciens, les astrologues ni les sages ne purent le deviner; en conséquence, Arioc, officier de sa maison, eut ordre de les faire mourir : le jeune Daniel devine le songe, et l‘explique; ce songe était une belle statue, etc. A quelque temps de là, Nébueadnetzar f‍it élever un colosse d’or pur, baut de soixante coudées, et large de six; il obligea tout son peuple assemblé d’adurer ce colosse au son du cor, du clairon, de la harpe, de la saquebute, et du psaltérion: et sur le refus qu‘en firent Sidrac, Misac, et Habed-nego, jeunes Hébreux, compagnons de Daniel, le roi les fit jeter dans une fournaise, qu'on chauffa cette fois-là sept fois plus qu'à l‘ordinaire; et ils en sortirent sains et saufs. Nébucadnetzar songes encore: il vit un arbre grand et fort; le sommet touchait les cieux, et les oiseaux habitaient dans ses branches. Un saint alors descendit, et cria : « Coupez l’arbre, et l’ébranchez, etc.» Daniel expliqua encore ce songe; il prédit au roi qu'il serait chassé d‘entre les hommes; que pendant sept ans son habitation serait avec des bêtes, qu’il paitrait l’herbe comme les bœufs, jusqu’à que son poil crut comme celui de l‘aigle, et ses ongles comme ceux des oiseaux; ce qui arriva. Tertullien et saint Augustin disent que Nabucodonosor s‘imagina être bœuf, par l'effet d‘une maladie qu'on nomme lycanthropie. Au bout de sept ans, ce prince recouvra sa raison, et remonta sur le trône : il ne vécut qu‘un an depuis son rétablissement, mais il l'employa si bien que saint Augustin, saint Jérôme, saint Épiphane, Theodoret, etc., cités par Pérérius comptent sur son salut. (Note de Voltaire, 1762.) — Voltaire fait ici, assez malencontreusement, parade de son érudition théologique. Un passage de la Bible de dom Calmet, qu‘il n'a pas lu assez attentivement, l‘a induit en erreur. C’est dom Calmet, et non le jésuite Pérérius, qui cite tous les personnages nommés dans la note de Voltaire. (R.)

  1. Il ne faut pas confondre George, patron d’Angleterre et de l’ordre de la Jarretières avec saint George le moine, tué pour avoir soulevé le peuple contre l‘empereur Zénon. Notre saint George est le Cappadocien, colonel au service de Dioclétien, martyrisé, dit-on, en Perse, dans une ville nommée Diospole. Mais comme les Persans n’avait point de ville de ce nom, on a placé depuis son martyre en Arménie, à Mitylène. Il n’y a pas plus de Mitylène en Arménie que de Diospole en Perse. Mais ce qui est constant, c'est que George était colonel de cavalerie, puisqu’il a encore son cheval en paradis. (Note de Voltaire, 1762.)