Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome9.djvu/269

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Et par le vol méritant son bonheur ;
Ce peuple errant pendant quarante années ;
Vingt mille Juifs égorgés pour un veau[1] ;
Vingt mille encore envoyés au tombeau
Pour avoir eu des amours fortunées[2] ;
Et puis Aod, ce Ravaillac hébreu[3],
Assassinant son maître au nom de Dieu ;
Et Samuel, qui d’une main divine
Prend sur l’autel un couteau de cuisine,
Et bravement met Agag en hachis[4],
Car cet Agag était incirconcis ;
Puis la beauté qui, sauvant Béthulie[5],
Si purement de son corps fit folie ;
Le bon Basa qui massacra Nadad[6] ;
Et puis Achab mourant comme un impie[7],
Pour n’avoir pas égorgé Benhadad ;
Le roi Joas meurtri par Jozabad[8],

  1. Les lévites, qui égorgèrent vingt mille de leurs frères. (Note de Voltaire, 1762.) — La Bible dit vingt-cinq mille. Voyez Judic, xx, 46.
  2. Phinées, qui fit massacrer vingt-quatre mille de ses frères, parce qu'un d'eux couchait avec une Madianite. [Num., xxv, 9.] (Note de Voltaire, 1762.)
  3. Aod, ou Eüd, assassina le roi Églon, mais de la main gauche. [Judic. iii, 21.] (Id., 1762.)
  4. Samuel coupa en morceaux le roi Agag, que Saül avait mis à rançon. [I Reg., xv,33.] (Id., 1762.)
  5. Judith, assez connue. (Id., 1762.)
  6. Basa, roi d'Israël, assassina Nadad ou Nadab, et lui succéda. [III. Reg., xv, 27 et 28.] (Id., 1762.)
  7. Achab avait eu une grosse rançon de Benhadad, roi syrien, comme Saül en avait eu une d'Agag, et fut tué pour avoir pardonné. (Note de Voltaire, 1762.) — Benhadad, vaincu, envoya des députés à Achab pour lui demander la vie. « S'il vit, répondit Achab aux députés, il n'est plus que mon frère. » Cette réponse, qui, humainement parlant, est d'une naïveté touchante et sublime, attira sur Achab la colère du ciel, et surtout celle des prophètes. [Rois, liv. III, chap. xx.] (K.)
  8. Joas, assassiné par Jozabad. [IV. Reg., xii, 21] (Note de Voltaire, 1762.) Nos anciens poëtes donnaient avec raison au mot meurtri le sens de tué, massacré, assassiné.

    On lit dans Rotrou (Venceslas, acte V, sc. Ire) :
    Pour un frère meurtri ma douleur a des larmes.

    Avant lui, Ronsard avait dit :
    Et pour te rendre infâme,
    T'ont fait meurtrir tes enfants et ta femme.

    Au temps de Racine, la signification de ce mot n'en faisait plus qu'un synonyme de blessé, contusionné, froissé; et l'auteur d'Athalie a, comme Voltaire, vainement essayé (acte V, sc. vi) de lui rendre le sens déterminé par son étymologie :
    Allez, sacrés vengeurs de vos princes meurtris. ( R.)