Page:Voltaire - Œuvres complètes Garnier tome9.djvu/535

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(Juil i)roteiuluit parler à des visages', On l'entoura, le désordre se tut.

(( Messieurs, dit-il, vous êtes nés tous sages; Ces mouvements sont des convulsions; C'est dans le foie, et surtout dans la rate, Que (îalien, Nicomaque, Hippocrate, Tous gens savants, placent les passions ; L'àme est du corps la très-humble servante ; Vous le savez, les esprits animaux Sont fort légers, et s'en vont aux cerveaux Porter le trouble avec riiumeur peccante. Consultons tous le célèbre Tronchin ; Il connaît l'àme, il est grand médecin ; Il peut beaucoup dans cette épidémie. ) Tronchin sortait de son académie Lorsque Dolot disait ces derniers mots : Sur son beau front siège le doux repos ; Son nez romain dès l'abord en impose ; Ses yeux sont noirs, ses lèvres sont de rose ; Il parle peu, mais avec dignité; Son air de maître est plein d'une bonté Qui tempérait la splendeur de sa gloire ; Il va tàtant le pouls du consistoire. Et du conseil, et des plus gros bourgeois.

Sur eux à peine il a placé ses doigts, de son art merveilleuse puissance ! vanités! ô fatale science! La fièvre augmente, un délire nouveau Avec fureur attaque tout cerveau. J'ai vu souvent ])rès des rives du Rhône Ln serviteur de Flore et de Pomone l'ar une digue arrêtant de ses mains Le flot bruyant qui fond sur ses jardins : L'oïide s'irrite, et, brisant sa barrière, Va ravager les œillets, les jasmins. Et des melons la couche printanière. Telle est Genève ; elle ne peut souffrir Qu'un médecin prétende la guérir: Chacun s'émeut, et tous donnent au diable

1. C'est Texpression de Molière dans le Malade imaginaire, acte III, scène iv. « On voit bien que vous n'avez pas accoutume de parler à des visages. »

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