Et que la loi suprême est qu’on souffre et qu’on meure,
Je pleure.
Mais lorsque sur le soir, avec des libertins.
Et plus d’une femme agréable,
Je mange mes perdreaux, et je bois les bons vins
Dont monsieur d’Aranda vient de garnir ma table ;
Quand, loin des fripons et des sots,
La gaîté, les chansons, les grâces, les bons mots,
Ornent les entremets d’un souper délectable ;
Quand, sans regretter mes beaux jours,
J’applaudis aux nouveaux amours
De Cléon et de sa maîtresse,
Et que la charmante amitié,
Seul nœud dont mon cœur est lié,
Me fait oublier ma vieillesse,
Cent plaisirs renaissants réchauffent mes esprits :
Je ris.
Je vois, quoique de loin, les partis, les cabales,
Qui soufflent dans Paris vainement agité
Des inimitiés infernales.
Et versent leur poison sur la société ;
L’infâme calomnie avec perversité
Répand ses ténébreux scandales :
On me parle souvent du Nord ensanglanté.
D’un roi sage et clément[1] chez lui persécuté,
Qui dans sa royale demeure
N’a pu trouver sa sûreté,
Que ses propres sujets poursuivent à toute heure :
Je pleure.
- ↑ Stanislas-Auguste Poniatowski, roi de Pologne.
- ↑ Dans le Mercure de juillet 1772, ce vers est ainsi :
Mais si mon débiteur veut bien me rembourser.
On conçoit que la censure ne pouvait dans le Mercure laisser imprimer l’abbé Terray, qui était alors contrôleur des finances, et avait fait violer les dépôts d’argent appartenant à des particuliers. Voltaire, dans sa lettre à Mme du Deffant, du 21 octobre 1770, dit qu’on lui prit deux cent mille francs, ce qui lui occasionna une perte de trois cent mille ; voyez aussi, tome X, le conte intitulé les Finances, qui est de 1775. (B.)