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Page:Voltaire - Traité sur la tolérance 1763.djvu/129

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Traité ſur la Tolérance. Chap. XIII.

moins dans la Communion de leurs frères : on vit même des grands Prêtres de leur ſecte.

    me preſque toutes les autres Nations, que l’âme eſt quelque choſe de délié, d’aérien, une ſubſtance légère, qui retenait quelque apparence du corps qu’elle avait animé ; c’eſt ce qu’on appellait les ombres, les mânes des corps. Cette opinion fut celle de pluſieurs Pères de l’Égliſe. Tertullien, dans ſon Chap. 22. de l’Ame, s’exprime ainſi : Deſinimus animam Dei flatu natam, immortalem, corporalem, effigiatam, ſubſtantiâ ſimplicem ; « Nous définiſſons l’âme née du ſouffle de Dieu, immortelle, corporelle, figurée, ſimple dans ſa ſubſtance. »

    St. Irénée dit dans ſon Livre II, Chap. 34. Incorporales ſunt animæ quantùm ad comparationem mortalium corporum. « Les âmes ſont incorporelles en comparaiſon des corps mortels. » Il ajoute, que « Jésus-Christ a enſeigné que les âmes conſervent les images du corps ; » Caracterem corporum in quo adoptantur, &c. On ne voit pas que Jésus-Christ ait jamais enſeigné cette Doctrine, & il eſt difficile de deviner le ſens de St. Irénée.

    St. Hilaire eſt plus formel et plus poſitif dans ſon Commentaire ſur St. Matthieu : il attribue nettement une ſubſtance corporelle à l’âme : Corpoream naturæ ſuæ ſubſtantiam ſortiuntur.

    St. Ambroiſe ſur Abraham, Liv. II, Chap. 8, prétend qu’il n’y a rien de dégagé de la matière, ſi ce n’eſt la ſubſtance de la Ste. Trinité.

    On pourrait reprocher à ces hommes reſpectables d’avoir une mauvaiſe Philoſophie ; mais il eſt à croire qu’au fond leur Théologie était fort ſaine, puiſque ne connaiſſant pas la nature incompréhenſible de l’âme, ils l’aſſuraient immortelle, & la voulaient Chrétienne.

    Nous ſavons que l’âme eſt ſpirituelle, mais nous ne

II iv