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dialogues philosophiques

préférence aux livres juifs sur le Zend-Avesta, sur le Véidam, sur l’Alcoran ?


L’HONNÊTE HOMME. — Je crains de n’avoir pas assez de lumières pour bien juger des livres, et je sens que j’en ai assez pour voir dans le grand livre de la nature qu’il faut adorer et aimer son maître.


LE CALOYER. — Y a-t-il quelque chose qui vous embarrasse dans les livres juifs ?


L’HONNÊTE HOMME. — Oui, j’avoue que j’ai de la peine à concevoir ce qu’ils rapportent. J’y vois quelques incompatibilités dont ma faible raison s’étonne.

1° Il me semble difficile que Moïse ait écrit dans un désert le Pentateuque qu’on lui attribue. Si son peuple venait d’Égypte où il avait demeuré, dit l’auteur, quatre cents ans (quoiqu’il se trompe de deux cents), ce livre eût été probablement écrit en égyptien ; et on nous dit qu’il l’était en hébreu.

Il devait être gravé sur la pierre ou sur le bois ; on n’avait, du temps de Moïse, d’autre manière d’écrire. C’était un art fort difficile, qui demandait de longs préparatifs ; il fallait polir le bois ou la pierre. Il n’y a pas d’apparence que cet art pût être exercé dans un désert où, selon ce livre même, la horde juive n’avait pas de quoi se faire des habits et des souliers, et où Dieu fut obligé de faire un mi-