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dialogues philosophiques

racle continuel pendant quarante années pour leur conserver leurs vêtements et leurs chaussures sans dépérissement. Il est si vrai qu’on n’écrivait que sur la pierre, que l’auteur du livre de Josué dit que le Deutéronome fut écrit sur un autel de pierres brutes enduites de mortier. Apparemment que Josué n’avait pas intention que ce livre fût durable.

2° Les hommes les plus versés dans l’antiquité pensent que ces livres ont été écrits plus de sept cents ans après Moïse. Ils se fondent sur ce qu’il y est parlé des rois, et qu’il n’y eut de rois que longtemps après Moïse ; sur la position des villes, qui est fausse si le livre fut écrit dans le désert, et vraie s’il fut écrit à Jérusalem ; sur les noms de villes ou de bourgades dont il est parlé, et qui ne furent fondées ou appelées du nom qu’on leur donne qu’après plusieurs siècles, etc.

3° Ce qui peut un peu effaroucher dans les écrits attribués à Moïse, c’est que l’immortalité de l’âme, les récompenses et les peines après la mort, sont entièrement inconnues dans l’énoncé de ses lois. Il est étrange qu’il ordonne la manière dont on doit faire ses déjections, et ne parle en nul endroit de l’immortalité de l’âme. Serait-il possible que Moïse, inspiré de Dieu, eût préféré nos derrières à nos esprits, qu’il eut prescrit la façon d’aller à la garde-robe dans le camp israélite, et qu’il n’eût pas dit un seul mot de la vie éternelle ? Zoroastre, antérieur au législateur juif, dit : Honorez, aimez vos parents, si vous voulez avoir la vie éternelle ; et le Décalogue dit :