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dialogues philosophiques

ni dans la Genèse, ni dans l’Évangile. C’est une ancienne fable des brachmanes.

Enfin, monsieur, tout le monde rit aujourd’hui de votre enfer, parce qu’il est ridicule ; mais personne ne rirait d’un Dieu rémunérateur et vengeur, dont on espérerait le prix de la vertu, dont on craindrait le châtiment du crime, en ignorant l’espèce des châtiments et des récompenses, mais en étant persuadé qu’il y en aura, parce que Dieu est juste.


LE COMTE. — Il me semble que M. Fréret a fait assez entendre comment la religion peut être un frein salutaire. Je veux essayer de vous prouver qu’une religion pure est infiniment plus consolante que la vôtre.

Il y a des douceurs, dites-vous, dans les illusions des âmes dévotes, je le crois ; il y en a aussi aux Petites-Maisons. Mais quels tourments quand ces âmes viennent à s’éclairer ! dans quel doute et dans quel désespoir certaines religieuses passent leurs tristes jours ; vous en avez été témoin, vous me l’avez dit vous-même : les cloîtres sont le séjour du repentir ; mais, chez les hommes surtout, un cloître est le repaire de la discorde et de l’envie. Les moines sont des forçats volontaires qui se battent en ramant ensemble ; j’en excepte un très petit nombre qui sont ou véritablement pénitents ou utiles ; mais, en vérité, Dieu a-t-il mis l’homme et la femme sur la terre pour qu’ils traînassent leur vie dans des cachots, séparés les uns des autres à jamais ? Est-ce