Page:Volterra - Henri Poincaré l'oeuvre scientifique, l'oeuvre philosophique, 1914.djvu/174

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jonglait avec nos systèmes de formules dont le poids suffit à écraser tant d’autres esprits, et en raison de cette aisance même, il ne cessait jamais de voir le fond, son attention n’étant pas absorbée par des difficultés de la forme. Pour les physiciens, l’analyse mathématique n’est qu’un instrument, mais dont le maniement est d’ordinaire aussi long et difficile à bien connaître que l’écriture chinoise ; on vieillit souvent avant de la posséder complètement, et on cesse de voir les choses pour avoir trop peiné sur des symboles. Henri Poincaré ne fut jamais embarrassé par les difficultés d’analyse ; il ne les connaissait presque pas plus que ne les connaît la nature elle-même et ne perdait jamais le contact avec celle-ci.

Là est, je crois, le secret du goût qu’il eut pour la physique mathématique, dont la difficulté principale n’existait pas pour lui.

À propos d’une expérience de Birkeland où les rayons cathodiques paraissaient se comporter de façon singulière dans le champ magnétique au voisinage d’un pôle d’électro-aimant, Poincaré sut voir que tout s’interprétait de la manière la plus naturelle au moyen de la loi élémentaire qui donne la force exercée par un champ magnétique sur une particule électrisée en mouvement et que les trajectoires obser-