Page:Volterra - Henri Poincaré l'oeuvre scientifique, l'oeuvre philosophique, 1914.djvu/230

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qui est réalisée dans la nature ? Ne peut-on pas mesurer les angles d’un triangle très grand, ayant pour sommets des étoiles, et calculer directement la somme de ces angles ? L’idée était séduisante, mais les adversaires de l’empirisme n’eurent pas de peine à montrer qu’elle ne pouvait pas donner lieu à une expérience décisive. Les observations humaines, dirent-ils, ne sont jamais rigoureusement exactes ; tout ce que pourrait donc prouver la mesure proposée, c’est que les angles du triangle ont une somme très voisine de deux droits (que la différence entre cette somme et deux angles droits ne peut pas être appréciée par nos instruments), et que, par conséquent, la géométrie de la nature est extrêmement rapprochée de celle d’Euclide ; mais il est impossible d’établir que les deux géométries coïncident exactement.

L’argument est bon, mais il ne prouve pas assez, et il est nécessaire de le compléter. Il faut remarquer, en effet, que l’expérience dont nous venons de parler implique une définition physique de la ligne droite : la ligne droite est le chemin parcouru par un rayon lumineux. Or, il est impossible de justifier expérimentale-ment une pareille définition. Tout se tient dans l’univers ; et si, comme nous l’avons imaginé